Un étranger est une personne qui n'a pas la nationalité du pays où elle se trouve au moment concerné. Cet état peut changer au cours de la vie d'un individu dans la mesure où il peut obtenir cette nationalité (par une procédure de naturalisation).
L'étranger peut aussi désigner un pays ou un ensemble de pays autre que celui dont on est citoyen.
Dans une acception moins courante, le terme plus ou moins amical d'étranger peut servir à qualifier ou à pointer une personne qui apparait comme “différente” ou “singulière”, par le fait qu'elle est perçue comme n'appartenant pas ou pas complètement au groupe familial, social, ethnique, politique, géographique, voire à une copropriété, une commune, une région, un club, une entreprise, etc.
Étymologie
Le mot étranger vient d'étrange (du latin extraneus, « du dehors, extérieur ; qui n'est pas de la famille, du pays, étranger »[2]), et est présent dans certains textes à partir du XIVe siècle[3].
Termes connexes à bien distinguer
La notion d'étranger doit être distinguée de plusieurs notions connexes qui ne sont pas équivalentes [4],[5] :
- Elle ne recouvre pas celle d'immigré puisque l'on peut être :
- étranger sans jamais avoir migré : cas des personnes nées dans un pays, qui y vivent, mais n'en ont pas toujours la nationalité ;
- immigré, mais pas étranger : cas des personnes qui sont nées étrangères, qui se sont installées dans un pays et ont pu en acquérir la nationalité.
- Le migrant est une personne qui quitte son pays d'origine pour venir s'installer durablement dans un pays dont elle n'a pas la nationalité. Si le terme “immigré” favorise le point de vue du pays d'accueil et le terme “émigré” celui du pays d'origine, le vocable “migrant” prend en compte l'ensemble du processus migratoire.
- Le sans-papier est une personne étrangère qui vit dans un pays sans en avoir obtenu le droit. Cette appellation indique qu'elle n'a pas de papiers l'autorisant à vivre dans ce pays (titre de séjour), mais cela ne signifie pas qu'elle soit dépourvue de papiers d'identité (carte d'identité ou passeport par exemple). Un “sans-papiers” n'est pas forcément entré clandestinement dans le pays : Il peut avoir été autorisé à entrer sur un territoire, mais ne pas avoir obtenu l'autorisation d'y rester.
- Le clandestin est une personne qui enfreint les règles relatives au droit de séjourner dans un pays et se soustrait à sa surveillance. Souvent les “sans-papiers” ne sont pas clandestins dans la mesure où leur situation est connue de l'administration du pays de séjour.
- Le demandeur d'asile est une personne qui a fui son pays parce qu'elle y a subi des persécutions ou craint d'en subir et demande protection à un pays d'accueil. L'examen de la demande (en France par l'OFPRA - Office français de protection des réfugiés et apatrides) conduit soit à la reconnaissance du statut de “réfugié”, soit au refus (demande “déboutée”).
- Le débouté est une personne demandeur d'asile dont la demande de reconnaissance du statut de “réfugié” a été rejetée. Elle devient alors, si elle refuse de quitter le territoire, un “sans-papiers” pour le pays ayant rendu cette décision.
- Le réfugié est une personne à qui un pays accorde une protection en raison des risques de persécution qu'elle encourt à cause de son appartenance à un groupe ethnique ou social, de sa religion, de sa nationalité ou de ses options politiques.
Histoire
L'historienne Simona Cerutti[6], se basant sur une analyse des archives des États de Savoie au XVIIIe siècle, établit à la fois que le terme « étranger » peut très bien ne pas s'appliquer à une personne venue d'ailleurs, et qu'une personne installée depuis longtemps peut parfaitement être définie comme étrangère : c'est l'appartenance au réseau local qui en est le critère. Par exemple, l'appartenance est reconnue à celui qui participe aux institutions charitables, tandis qu’elle est refusée aux miséreux.
Les implications de cette définition ont une portée considérable : « La peur des étrangers n'était pas le sentiment éprouvé par celui qui était assiégé par une minorité inconnue et menaçante, mais plutôt la crainte diffuse d'une chute sociale qui pouvait intervenir dans tout parcours. »
En France
Au sens juridique du terme, « sont considérées comme étrangers les personnes qui n'ont pas la nationalité française, soit qu'elles aient une nationalité étrangère, soit qu'elles n'aient pas de nationalité » (article L. 111-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile)[7].
Cependant, tout citoyen européen peut voter aux élections locales des États membres de l'Union européenne : « le droit de vote et le droit de se présenter aux élections locales et européennes dans n'importe quel État membre sous les mêmes conditions que les nationaux de cet État » (Articles 10 TUE, 20§2b et 22 TFUE)[8]. Par exemple, un Espagnol (sous réserve qu'il en remplisse les conditions) peut voter aux élections municipales de Paris.
Références
- British Museum
- « ÉTRANGE : Définition de ÉTRANGE », sur cnrtl.fr (consulté le ).
- Dictionnaire Le Petit Robert, édition de 1967.
- « Petit Guide pour lutter contre les préjugés sur les migrants », édité par l'organisation La Cimade [1]
- Florent Lacaille-Albiges, « Migrant, émigré, exilé : quelles différences ? » , sur National Geographic, (consulté le )
- Simona Cerutti, Étrangers - Étude d'une condition d'incertitude dans une société d'Ancien Régime, Bayard, 2012
- « Article L111-1 - Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - Légifrance », sur www.legifrance.gouv.fr (consulté le )
- « Décision n° 2016-733 DC du 28 juillet 2016 - Légifrance », sur www.legifrance.gouv.fr (consulté le )
Voir aussi
- L'Étranger, roman d'Albert Camus, Prix Nobel de littérature en 1957.
Bibliographie
- AGA (Y.), « Réflexion sur l’aubain : introduction à l’étude des étrangers à l’époque moderne », in BARBICHE (B.), POUSSOU (J.-P.) et TALLON (A.), Pouvoirs, contestations et comportements dans l’Europe moderne, Mélanges en l’honneur du professeur Yves-Marie Bercé, Paris, PUPS, 2005, p.1021-1039.
- Mickaël Augeron et Pascal Even, dir., Les étrangers dans les villes-ports atlantiques. Expériences françaises et allemandes, XVe – XIXe siècle, Paris, Les Indes savantes, 2010.
- Alteroche (Bertrand d’), De l’étranger à la seigneurie à l’étranger au royaume, XIe – XVe siècle, Thèse de droit, Univ. de Paris II, 2000.
- Barbare (Le), l’étranger : images de l’autre, Actes du colloque organisé par le C.E.R.H.I., Saint-Étienne, 14 et , textes réunis et présentés par D. Nourrisson et Y. Perrin, Vol. n° 2, Publ. de l’Université de Saint-Étienne, 2005
- Billot (Claudine), « L’assimilation des étrangers dans le royaume de France aux XIVe et XVe siècles », Revue historique, n° 548, 1983, p. 273-296.
- BOIZET (J.), Les lettres de naturalité sous l’Ancien Régime, Thèse de droit, Paris, 1943.
- "L’Étranger au Moyen Âge". Actes du XXXe congrès de la SHMESP, Göttingen, 1999, Paris, Publ. de la Sorbonne, 2000
- "Étrangers à la cour de Bourgogne (Les)", Revue du Nord, t. 84, n° 345-346, Avril-Sept. 2002.
- "De l’Étranger à l’étrange ou la conjoncture de la merveille", Sénéfiance, n° 25, Publ. du CUERMA, Aix-en-Provence, 1988.
- Simona Cerutti, Etrangers. Étude d'une condition d'incertitude dans une société d'Ancien Régime, Bayard, 2012
- CERUTTI (S.), « À qui appartiennent les biens qui n’appartiennent à personne ? Citoyenneté et droit d’aubaine à l’époque moderne », in Annales Histoire, Sciences Sociales, 62e année, n°2, mars-, p.355-383.
- Clochard (Olivier) , Atlas des migrants en Europe, géographie critique des politiques migratoires, Aramnd Colin 2009
- Contamine (Philippe), « Qu’est-ce qu’un étranger pour un Français de la fin du Moyen Âge ? », Peuples du Moyen Âge : Problèmes d’identification, sous la dir. de C. Carozzi et H. Taviani-Carozzi, Aix-en-Provence, Publication de l’université de Provence, 1996, p. 27-44.
- DUBOST (J.-F.), La France italienne : XVIe – XVIIe siècle, Paris, Aubier, 1997.
- DUBOST (J.-F.) et SAHLINS (P.), Et si on faisait payer les étrangers ? Louis XIV, les immigrés et quelques autres, Paris, Flammarion, 1999.
- Heran (François), Le temps des imlmigrés, essai sur le destin de la population française, seuil 2007.
- Edmond Jabès, Dialogue avec François Rachline, De l'étranger à l'étranger, Préface à Découverte de l'Archipel d'Elie Faure (1991), repris dans la revue Nunc, 2015.
- Le Jan (Régine), « Remarques sur l’étranger au haut Moyen Âge », dans L’image de l’autre dans l’Europe du Nord-Ouest, sous la dir. de J.-P. Jessenne, Lille, Centre de recherche sur l’histoire de l’Europe du Nord-Ouest, 1996, p. 23-32.
- Yves Lequin (dir.), La mosaïque France, histoire des étrangers et de l’immigration, Paris, Larousse, 1988.
- MATHOREZ (J.), Les étrangers en France sous l’ancien régime : histoire de la formation de la population française, Paris, Champion, 1919, 2 vol.
- Moal (Laurence), L’étranger en Bretagne au Moyen Âge. Présence, attitudes, perceptions, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2008.
- Montandon (Alain, dir.), Le livre de l’hospitalité, accueil de l’étranger dans l’histoire et les cultures, Paris, éd. Bayard, 2004.
- POUSSOU (J.-P.), « Le service du roi (XVIe siècle-1815) » in LEQUIN (Y.), Histoire des étrangers et de l’immigration en France, Paris, Larousse, 1988, p.151-194 et p. 226-240.
- RAIMBAUD (E.), Les étrangers en Bretagne d’après les lettres de naturalité (XVIème-1661), mémoire de maîtrise, dir. LE PAGE (D.), Nantes, 1999.
- SAHLINS (P.), « La Nationalité avant la lettre : les pratiques de naturalisation en France sous l’Ancien Régime », in Annales Histoire, Sciences Sociales, Volume 55, n°5, 2000, p.1081-1108.
- Simon (Gildas) La planète migratoire dans la mondialisation, Armand Colin 2008
- Ragot (Lionel), Jayet (Hubert), Rajaonarison (Dominique) , L'immigration, quels effets économiques, revue d'économie politique n° 4, juillet-Aout 2001