| Directeur CollĂšge Sainte-Barbe | |
|---|---|
| - |
| Naissance | |
|---|---|
| DécÚs | |
| Nom de naissance |
Pierre Victor Alexandre Labrouste |
| Nationalité | |
| Formation | |
| Activités | |
| PĂšre | |
| Fratrie |
| Distinction |
|---|
Pierre Victor Alexandre Labrouste, nĂ© le Ă Paris, ville oĂč il est mort dans le 5e arrondissement le [1], est un juriste et pĂ©dagogue, directeur du collĂšge Sainte-Barbe de 1838 jusquâĂ sa mort.
Origines familiales
[modifier | modifier le code]NĂ© Ă Paris sous le Directoire, Alexandre Labrouste est issu dâune famille de juristes bordelais favorables aux idĂ©es rĂ©volutionnaires mais toutes girondines dans leur modĂ©ration. Ainsi, son pĂšre, François-Marie-Alexandre Labrouste[2], membre du Conseil des Cinq-Cents en 1796 puis du Tribunat jusquâen 1807, sera Ă ce titre un soutien utile Ă lâEmpire. Parmi ses trois frĂšres, Alexandre comptera deux architectes de renom, ThĂ©odore, nĂ© en 1799, et Henri, nĂ© en 1801, cĂ©lĂšbre auteur de la bibliothĂšque Sainte-GeneviĂšve sur la place du PanthĂ©on.
ĂlĂšve au collĂšge Sainte-Barbe Ă la suite de son frĂšre aĂźnĂ©, Labrouste y fait preuve de qualitĂ©s si remarquĂ©es par Victor de Lanneau, le directeur de lâInstitution, que ce dernier en vient Ă regretter publiquement son dĂ©part.
AprĂšs son succĂšs au baccalaurĂ©at, il entreprend des Ă©tudes de droit pour acquĂ©rir ensuite une charge dâavouĂ©[3] dans la capitale. Il dĂ©montre dans ces fonctions dâun sĂ©rieux et dâune efficacitĂ© qui lui valent, selon les contemporains, lâestime de ses collĂšgues comme celle de ses clients. Le , il se marie avec Julie Andrieux, fille aĂźnĂ©e de François Andrieux, littĂ©rateur mais dâabord juriste comme son pĂšre qui lâa, de plus, cĂŽtoyĂ© au Tribunat comme au Conseil des Cinq-Cents.
La direction du collĂšge Sainte-Barbe
[modifier | modifier le code]Au dĂ©but de la Monarchie de Juillet, « barbiste » engagĂ©, Labrouste intervient rĂ©guliĂšrement dans la bonne marche du collĂšge, notamment au sein de sa SociĂ©tĂ© des actionnaires mais surtout de sa Commission de surveillance. Depuis 1835, il en assure les fonctions de secrĂ©taire pour se voir proposer, trois ans plus tard, Ă la suite d'Adolphe de Lanneau[4], la direction de lâInstitution.
Labrouste, qui espĂšre alors devenir juge de paix pour ensuite entrer au tribunal de premiĂšre instance de Paris comme magistrat, aprĂšs avoir refusĂ© cette offre, lâaccepte quand il apprend que le poste quâil visait a Ă©tĂ© donnĂ© Ă un confrĂšre. Cette solution lui plaĂźt dâautant plus qu'il manifeste depuis toujours dâun fort intĂ©rĂȘt pour les questions pĂ©dagogiques.
Soucieux dâoffrir Ă Sainte-Barbe les conditions de sa pĂ©rennitĂ©, il met toutefois des conditions Ă son arrivĂ©e. Dâabord que les dettes de lâinstitution â alors importantes au point dâen menacer la survie - soient totalement Ă©teintes et quâensuite, clĂ© puissante de rĂ©ussite, que lui soit donnĂ©e carte blanche dans le choix des enseignants et de ses collaborateurs, du plus humble au plus Ă©levĂ© en grade.
DĂšs sa prise de fonctions, lâobjectif prioritaire de Labrouste est l'amĂ©lioration des locaux qui sont Ă cette date dans un Ă©tat dĂ©plorable[5]. AprĂšs deux annĂ©es dâincertains conflits juridiques, il parvient Ă racheter la totalitĂ© des bĂątiments et des terrains, y compris en mobilisant ses fonds personnels. Il peut dĂšs lors reconstituer lâemprise du collĂšge dâorigine et mĂȘme y ajouter certaines parcelles voisines. Le Directeur a ainsi la possibilitĂ© de lancer, dĂšs 1840, la construction de lâĂ©tablissement moderne, dont il rĂȘve depuis sa prise de fonctions. MenĂ© dâaprĂšs les plans et sous la direction de ses deux frĂšres, ThĂ©odore et Henri, le chantier est terminĂ© en 1853.
Labrouste dispose, dĂšs lors, dâun outil dont la modernitĂ© frappe les observateurs de lâĂ©poque : clartĂ© des salles, espaces gĂ©nĂ©reux et fonctionnels, chauffage collectif efficace, habile combinaison dans la construction de matĂ©riaux Ă faible coĂ»t[6]. Ă partir de cet instant, le directeur de Sainte-Barbe va donner Ă son Ă©tablissement un dĂ©veloppement sans prĂ©cĂ©dent. Preuve du succĂšs de lâentreprise, les effectifs triplent et dĂ©passent le millier dâĂ©lĂšves en une dizaine dâannĂ©es.
Au cĆur de cette dynamique, Labrouste a saisi dĂšs 1835 que lâattractivitĂ© d'une structure provient dâabord, non pas de la qualitĂ© des Ă©tudes initiales offertes aux Ă©lĂšves en dĂ©but de cursus, mais, par effet inversĂ©, de lâefficacitĂ© des prĂ©parations permettant aux Ă©lites dâintĂ©grer les Ă©coles dâĂtat fondĂ©es par la RĂ©volution puis affermies par lâEmpire, ainsi Normale supĂ©rieure ou Polytechnique[7]. La crĂ©ation de ces classes prĂ©paratoires, appelĂ©e par Labrouste « Instituts prĂ©paratoires aux Ă©coles spĂ©ciales du gouvernement » Ă©tablit dĂ©finitivement la rĂ©putation de l'Ă©tablissement : en 1853, plus du tiers de la promotion reçue Ă lâX sort de Sainte-Barbe[8].
Autre intuition gĂ©niale, Labrouste crĂ©e enfin une annexe hors de la capitale pour les collĂ©giens. Cette fondation permet de rĂ©pondre au manque de place du site parisien qui bride la croissance des effectifs des classes prĂ©paratoires. Elle souscrit aussi aux bienfaits de lâhygiĂšne moderne permis par l'Ă©loignement de la ville afin de favoriser le dĂ©veloppement harmonieux des jeunes enfants. Ouverte en 1852 Ă Fontenay-aux-Roses, cette propriĂ©tĂ© accueille ses internes au cĆur dâun parc et des locaux amĂ©nagĂ©s par ThĂ©odore. Les effectifs, infĂ©rieurs Ă la centaine lors de lâouverture, passent Ă plus de quatre cents Ă©lĂšves en quelques annĂ©es[9].
Un directeur dâĂ©lite pour un public dâĂ©lite
[modifier | modifier le code]Assurant avec constance un vĂ©ritable sacerdoce fait de grandes et de petites servitudes[10], le directeur, secondĂ© par des adjoints dâĂ©lite, souvent barbistes, agrĂ©gĂ©s de lâUniversitĂ© et par ailleurs professeurs de haute volĂ©e (ainsi Alphonse Blanchet mais surtout AimĂ© Godart, futur fondateur de l'Ăcole Monge), sâapplique aussi Ă amĂ©liorer les mĂ©thodes pĂ©dagogiques. Il met en place un systĂšme d'apprentissage tout entier construit sur le rĂ©sultat. Ainsi, l'Ă©valuation est basĂ©e sur un contrĂŽle incessant qu'on qualifie, terme appelĂ© Ă faire florĂšs, de « colles » constituĂ©es d'interrogations orales trĂšs frĂ©quentes auxquelles sont soumis deux Ă©lĂšves choisis au hasard. Les notes attribuĂ©es, puis les moyennes qui en dĂ©coulent, donnent lieu ensuite Ă des classements trimestriels. HabituĂ©s Ă cette rĂ©itĂ©ration constante des conditions de passation des concours - Ă cette Ă©poque uniquement oraux - les Ă©lĂšves de Sainte-Barbe affrontent ces derniers avec une efficacitĂ© inĂ©galĂ©e.
Labrouste interdit aussi le bizutage, tradition enracinĂ©e dans tous les Ă©tablissements de la montagne Sainte-GeneviĂšve[11], le remplaçant par un tutorat individuel des nouveaux Ă©lĂšves par les anciens[12]. Cette reprise en main, peut-ĂȘtre un peu contradictoire avec les prĂ©ceptes libĂ©raux de Lanneau, conduit d'ailleurs au dĂ©but de sa mise en Ćuvre, une partie des Ă©lĂšves Ă s'y opposer. Ă deux reprises, en , puis en , les internes se soulĂšvent contre la direction, saccagent les locaux en rĂ©clamant des droits dont la diversitĂ© Ă©tonne[13]. Par une fermetĂ© sans concession qui passe souvent par l'exclusion dĂ©finitive, Labrouste reprend les choses en main. Aucune rĂ©volte ne sera Ă relever dans les dĂ©cennies qui suivront.
Signe d'un sens de l'autoritĂ© insĂ©parable de ce qui prĂ©cĂšde, Labrouste entretient avec les diffĂ©rents ministres de lâinstruction publique, notamment sous le Second Empire, des relations qui, quoique rĂ©guliĂšres, ne l'empĂȘchent pas d'affirmer ses convictions quand elles visent Ă assurer la pĂ©rennitĂ© de Sainte-Barbe. Ainsi, il sâoppose publiquement en 1852 Ă Fortoul lorsque ce dernier lance son « systĂšme de bifurcation » qui sĂ©pare, dĂšs la classe de 4e, les Ă©tudes de lettres de celles des sciences, dĂ©buts timides d'une spĂ©cialisation des parcours scolaires. Faisant fi des instructions, Labrouste ne change pas lâorganisation de son Ă©tablissement jusqu'Ă l'abandon, Ă bas bruits, de cette rĂ©forme aventureuse. Les ministres suivants, Rouland mais surtout Duruy, abordent Ă leur tour l'institution de la rue Valette avec un intĂ©rĂȘt mĂątinĂ© de mĂ©fiance et surtout de prudence, compte tenu des soutiens qu'elle connait alors dans tous les Ă©chelons de lâĂtat[14].
Directeur hors pair constamment soutenu par ses mandants de 1838 à sa mort brutale en fonction - à 70 ans - en 1866, trÚs supérieur à ses successeurs, Alexandre Labrouste apparaßt pour ces raisons un témoin intéressant de la situation du systÚme éducatif dans une période fondatrice, celle qui précÚde les lois scolaires de la IIIe République. Paradoxe qui accompagne souvent les victoires des pionniers, beaucoup d'innovations inventées à Sainte-Barbe se retrouveront à divers titres dans l'enseignement public, non sans affaiblir les établissements privés. En effet, en adoptant quelques traits de son organisation mais surtout ses principes d'excellence, le nouveau pouvoir donnera à ses lycées, notamment parisiens, les clés d'un irrésistible triomphe[15].
Sources
[modifier | modifier le code]- Jules Quicherat, Histoire de Sainte-Barbe, collÚge, communauté, institution, Paris, Hachette, 1460-1864, 3 vol.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- â Son acte de dĂ©cĂšs (n°499) dans les registres de dĂ©cĂšs du 5Ăšme arrondissement de Paris pour l'annĂ©e 1866
- â NĂ© Ă Bordeaux en 1762 et tuĂ© lors de lâattentat de Fieschi en 1835.
- â Un avouĂ© est, depuis 1791, un officier ministĂ©riel chargĂ© de reprĂ©senter les parties devant les tribunaux et de faire en leur nom les actes de procĂ©dure civile.
- â Fils de Victor de Lanneau qui est mort en 1830.
- â Vendus comme biens nationaux durant la RĂ©volution, les bĂątiments du collĂšge appartiennent sous lâEmpire Ă de multiples propriĂ©taires avec lesquels Sainte-Barbe entretient des relations difficiles.
- â Ces bĂątiments construits par les frĂšres Labrouste encadraient l'arriĂšre de la bibliothĂšque Sainte-GeneviĂšve construite dix ans plus tard. Ils ont Ă©tĂ© dĂ©molis dans les annĂ©es 1960, Ă l'inverse des locaux rĂ©alisĂ©s en 1884 par Lheureux Ă destination des classes prĂ©paratoires, aujourd'hui restaurĂ©s et transformĂ©s en bibliothĂšque universitaire. Dans ce dernier cas, l'architecte s'est inspirĂ© des leçons de son maĂźtre, adoptant, outre un style Ă©clectique qui utilise meuliĂšre, pierre, brique et mosaĂŻques pour les dĂ©corations intĂ©rieures, une ossature mĂ©tallique pour les grandes salles, ainsi les amphithéùtres de physique et de chimie comme la salle de dessin.
- â Si Sainte-Barbe prĂ©pare avec succĂšs Ă lâĂcole polytechnique et lâENS pour sa voie scientifique, elle vise aussi les Mines, la Marine, lâĂcole centrale des arts et manufactures, lâĂcole forestiĂšre et enfin lâĂcole militaire de Saint-Cyr. Ces institutions seront peuplĂ©es, peu Ă peu, par une multitude de barbistes qui sauront Ă leur tour porter le renom de leur collĂšge dans les plus hautes sphĂšres de l'Ătat.
- â On peut ajouter Ă cette architecture, les cours gratuits dits « ConfĂ©rences » qui permettent la prĂ©paration Ă la licence universitaire mais surtout Ă lâagrĂ©gation de grammaire, lesquels, Ă partir de 1845, rencontrent un succĂšs grandissant.
- â Sainte-Barbe des Champs sera fermĂ©e en 1899 quand le collĂšge ne pourra plus assumer les dĂ©penses de gestion du lieu.
- â Labrouste adopte ainsi les prĂ©ceptes de Lanneau « Tout voir, tout embrasser, pĂ©nĂ©trer, animer tout, ĂȘtre partout le conseil et le modĂšle, possĂ©der le double avantage dâun caractĂšre ferme et pliant, un jugement docile et sĂ©vĂšre, des vues libĂ©rales, un dĂ©sintĂ©ressement parfait, telles sont les qualitĂ©s, tels sont les devoirs dâun bon directeur de collĂšge »
- â Y compris Ă Polytechnique oĂč les « postes et bascules » agitent alors lâĂcole Ă toute arrivĂ©e dâune nouvelle promotion.
- â Plus rĂ©vĂ©lateur des mĆurs anciennes de ces Ă©tablissements créés au Moyen Ăge, il met fin aussi Ă la licence qui Ă©tait offerte aux Ă©lĂšves le jour de la Sainte-Barbe de disposer des locaux sans aucune surveillance dâadulte.
- â « Le droit de fumer, celui de porter une blouse pour protĂ©ger les vĂȘtements et enfin et surtout le renvoi d'un enseignant jugĂ© trop autoritaire ». Aucun de ces points ne fut retenu.
- â Fait chevalier de la LĂ©gion d'honneur par la IIe RĂ©publique en aoĂ»t 1849, Rouland Ă©lĂšvera Labrouste au grade d'officier en aoĂ»t 1861.
- â Sainte-Barbe ne retrouvera jamais son rayonnement du milieu du XIXe siĂšcle, connaissant mĂȘme, Ă la fin de cette pĂ©riode, de grandes difficultĂ©s financiĂšres, l'Ătat intervenant Ă plusieurs reprises pour en Ă©viter la fermeture.
Liens externes
[modifier | modifier le code]
- Ressource relative aux beaux-arts :
- Ressource relative Ă la vie publique :
- Ressource relative Ă la recherche :
- Pédagogue du XIXe siÚcle
- Pédagogue français
- Juriste français du XIXe siÚcle
- ĂlĂšve du collĂšge Sainte-Barbe
- Officier de la Légion d'honneur promu en 1861
- Naissance en mars 1796
- Naissance dans l'ancien 4e arrondissement de Paris
- DécÚs en février 1866
- DécÚs dans le 5e arrondissement de Paris
- DécÚs à 69 ans

