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Centaure et Bacchante, parfois appelé Centaure enlevant une nymphe[B 1], est un groupe statuaire situé à Caen, dans le département du Calvados, en France. Réalisé en bronze par Arthur Le Duc pour le salon de 1879, il est installé dans la cour du musée des Beaux-Arts de Caen en 1880. Mutilé en 1944, il est un temps mis en dépôt avant d'être installé à son emplacement actuel à côté du Mémorial de Caen en 1990.
Localisation
L’œuvre se trouve à côté du Mémorial de Caen.
Histoire
Arthur Le Duc présente un plâtre[1] intitulé Centaure et Bacchante au salon de 1878[2],[3]. Il obtient pour cette œuvre une médaille honorable[4].
Le bronze définitif du même nom est exposé au salon de 1879[5]. L’œuvre reçoit une médaille de troisième classe[4]. Le groupe est acquis par l'État[6] avec la participation de la ville de Caen[7],[8]. Il est envoyé dans cette ville où il est installé le 10 mars 1880 dans la cour de l'ancien séminaire des Eudistes qui abrite, entre autres[note 1], le musée des Beaux-Arts de Caen[10]. Le groupe est placé à côté de l'entrée, au milieu de la cour, à gauche en rentrant par la place de la République (côté sud)[11],[C 1]. L’œuvre vient remplacer un des deux groupes d'Auguste Lechesne, Combat et frayeur et Victoire et reconnaissance, réalisés en ciment de Dreux et détruits par les intempéries[12].
Lors de l'Occupation, les forces allemandes exigent en la mobilisation des métaux non ferreux. La loi du 11 octobre 1941 relative à l'enlèvement des statues et monuments métalliques en vue de la refonte prévoit que « sera procédé à l'enlèvement des statues et monuments en alliage cuivreux sis dans les lieux publics et dans les lieux administratifs, qui ne présentent pas un intérêt artistique ou historique »[A 1],[13]. Dans un premier temps, l’œuvre est conservée du fait de son intérêt artistique[A 2]. Mais en janvier 1943, le ministère de l’Éducation nationale prescrit l'enlèvement du groupe Centaure et Bacchante[A 3]. Dans un rapport du 4 juillet 1943, Michel Cacaud, préfet du Calvados, déclare que :
« le groupe Centaure et Bacchante ne décore pas une place ou rue de Caen, ce n'est pas un monument public, mais l'une des œuvres exposées au musée municipal des beaux-arts (catalogue sculptures no 16[14]). Il appartient aux collections privées de la ville de Caen et de ce fait devrait être exclu de la récupération. Il s'agit d'ailleurs d'une œuvre d'art de valeur, d'une excellente facture, l'une des meilleurs œuvres de l'animalier normand LE DUC. La municipalité de Caen et l'opinion réclament instamment sa conservation[A 4]. »
Parallèlement, la municipalité intervient auprès de Louis Hautecœur, secrétaire général des Beaux-Arts[note 2], qui refuse de revenir sur la décision[A 4]. Le préfet réitère son argument selon lequel l’œuvre appartient au collection du musée, que « ces dimensions encombrantes seules l'avait fait placer dans l'accès du musée » et qu'à ce titre, elle n'est pas visée par la loi du 11 octobre 1941[A 4]. Finalement, le délégué général à la mobilisation des métaux non ferreux donne son accord au maintien de l’œuvre[A 4].
Pendant la bataille de Caen en 1944, l'ancien séminaire des Eudistes, bombardé plusieurs fois, est totalement détruit[C 2]. Le groupe, endommagé[6],[C 3], est alors retiré. Il est déposé dans une cour de la rue de Geôle (probablement la cour de la maison des Quatrans)[15].
En 1990, le groupe est placé dans le jardin aménagé autour du Mémorial de Caen[6] qui vient d'être construit. Dans le cadre du premier budget participatif de la Ville de Caen, il est demandé la réinstallation en centre-ville de plusieurs statues déplacées après la Seconde guerre mondiale. Si le monument à Demolombe a bien été réinstallé en 2024 sur la place de la République, le Centaure et Bacchante est resté quant à lui à côté du Mémorial[16],[note 3].
![](http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/5/56/Centaure_et_bacchante_caen.jpg/220px-Centaure_et_bacchante_caen.jpg)
Description
L’œuvre a été mutilée en 1944, mais des photographies d'avant-guerre, ainsi que des reproductions[19],[B 2], permettent de connaître l’œuvre complète.
L'ensemble, réalisé en bronze, représente un centaure, lancé au galop, en suspension dans les airs, les pattes avant et sa patte arrière-gauche projetées de chaque côté de son corps[B 2]. Il emporte une bacchante[3],[20] qui vient de poser sa cuisse avec légèreté sur sa croupe[B 2]. Celle-ci tend son bras pour récupérer un tambourin avec des cymbalettes que le centaure tient dans sa main gauche[19], la main de celui-ci étant suspendue dans l'air « dans un mouvement gracieux de danseur »[B 2]. Les mains des deux créatures s'effleurent à peine[B 2]. L'ensemble « forme une diagonale […] s'apparent[ant] à une chorégraphie[B 2] ».
La chevelure de la bacchante est ornée de pampre et de raisin[B 2]. Elle porte une légère tunique dotée d'un drapé s'envolant en arrière[B 2]. Elle tient dans la main gauche un thyrse[3],[19], symbole de prospérité, de fertilité et d'hédonisme. Le centaure porte sur le dos une peau de bête tombant au sol[B 2]. Ces différents éléments (tambourin, peau de bête, pampre, thyrse) rappellent l'univers des thiases dyonisaques[B 2].
En 1944, la statue du centaure a perdu son bras droit, sa main gauche et sa patte avant gauche. Le thyrse de la bacchante a également disparu en 1944. Le tambourin dans la main du centaure a en revanche déjà disparu sur une photo datant de 1938[11].
Dans la cour du musée, le groupe reposait sur un piédestal. Aujourd'hui, il est placé sur une simple dalle.
Dimensions de l’œuvre complète[20] :
- 2,64 mètres de haut ;
- 1,31 mètres de long ;
- 0,70 mètre de large.
- Détails du monument
Interprétation de l’œuvre
L'ensemble témoigne « d'une grâce et d'un dynamisme éloquents »[B 2]. Arthur Le Duc s'inspire du mythe ovidien de l'enlèvement de Déjanire par le centaure Nessos[B 2]. Le sculpteur s’applique à exposer l'instinct animal du centaure. Le centaure, barbu, déploie un large sourire et lance une œillade « lubrique », alors que le visage délicat de la nymphe, dont la bouche est entrouverte, semble légèrement anxieux[B 2].
Mais l'artiste change ici profondément le sens du mythe, car il met l'accent sur la volupté et la sensualité de ce qui apparaît comme « une envolée amoureuse et romantique »[B 2]. Il insiste ainsi davantage sur le charme et le dynamisme de la scène (mains qui s'effleurent, corps élancé du centaure au galop, drapé de la tunique de la bacchante, le tout formant « une composition aérienne et virevoltante »)[B 2].
La position de la partie animale du centaure évoque directement l'allure d'un cheval[B 2]. S'exprime ainsi le talent de sculpteur animalier d'Arthur Le Duc, hérité de son professeur Antoine-Louis Barye dont il a suivi les cours d'anatomie animale au Muséum national d'histoire naturelle[B 2].
Reproductions
- Moulage en plâtre, exposé au musée de Torigny[21], détruit en 1944[6] ;
- Modèle réduit en bronze :
- exposé au musée des Beaux-Arts de Rouen[B 1] ;
- conservé au musée d'Orsay[B 1],[22] ;
- conservé au musée des Beaux-Arts de Caen[19].
Notes et références
Notes
- ↑ L'ancien séminaire abritait notamment l'école des Beaux-Arts dans laquelle Arthur Le Duc fut élève[9].
- ↑ Louis Hautecœur a occupé une chaire de professeur d'histoire de l'architecture à l'université de Caen de 1919 à 1921[A 5].
- ↑ Les dénicheurs, constitués de deux groupes sculpés intitulés Enfants dénicheurs[17] et Enfants dénicheurs mordus par des serpents[18], d'Auguste Jean Baptiste Lechesne, qui ont été installés en 1862 sur la place de la République (côté ouest), restent également conservés dans les collections du Mémorial et du musée de Normandie.
Références
- Emmanuel Luis, « Entre envois à la fonte et souci de sauvegarde, la statuaire publique sous le régime de Vichy dans le Calvados », Bulletin de la société des antiquaires de Normandie, vol. LXXV (2016), , p. 9-48
- Clara Lespessailles (Mémoire de l'école du Louvre), Le centaure dans les arts (XIXe – XXe siècles) : permanence ou rupture ? : annexe 2, (lire en ligne [PDF])
- Lespessailles 2019, p. 205.
- Lespessailles 2019, p. 206.
- Claire Bénard (dir.), Sandrine Berthelot (dir.), Vincent Hincker (dir.) et al., De la place royale à la place de la République : Quatre siècles d'histoire de la ville de Caen (1575-1975), Bayeux, Orep, (ISBN 9782815109772)
- ↑ Bénard, Berthelot et Hincker 2024, p. 39.
- ↑ Bénard, Berthelot et Hincker 2024, p. 67-69.
- ↑ Bénard, Berthelot et Hincker 2024, p. 89.
- Autres références :
- ↑ « Centaure et Bacchante ; groupe, plâtre », sur Base Salons (1673-1914) (consulté le )
- ↑ Henry Jouin, La sculpture au Salon de 1878, Paris, Plon, (lire en ligne), p. 63
- Auguste Létienne, Arthur-Jacques Le Duc : statuaire, Caen, (lire en ligne), p. 9-10
- « Le Duc », sur e-monumen (consulté le )
- ↑ « Centaure et Bacchante ; groupe, bronze », sur Base Salons (1673-1914) (consulté le )
- « Le Centaure et la Bacchante à Caen », sur À nos grands hommes (consulté le )
- ↑ Fernand Enguerrand, « Histoire du musée de Caen », Bulletin de la Société des beaux-arts de Caen, Caen, Imprimerie Charles Valin, vol. 10 (1er cahier), , p. 138 (lire en ligne)
- ↑ Société des beaux-arts de Caen, Bulletin de la Société des beaux-arts de Caen, vol. 6, Caen, A. Hardel, (lire en ligne), p. 181
- ↑ « Pierre Le Nordez », sur Wikimanche (consulté le )
- ↑ « Le centaure et la bacchante », Journal de Caen, no 2372, (lire en ligne)
- « Photographies de Caen (notamment fêtes provençales) - 110Fi/12 », sur Archives départementales du Calvados (consulté le )
- ↑ « Lechesne et son œuvre », Bulletin de la Société des beaux-arts de Caen, vol. 8, , p. 247 (lire en ligne)
- ↑ « Lois », Journal officiel de l'État français, no 283, (lire en ligne)
- ↑ Gustave Ménégoz, Catalogue des tableaux, sculptures, dessins, gravures et aquarelles, exposés dans les galeries du musée de Caen, Caen, L. Jouan et R. Bigot, (lire en ligne)
- ↑ « Statue "Le groupe Centaure et Centauresses" », sur forum de l'association Cadomus (consulté le )
- ↑ Margaux Rousset, « Ce monument va faire son grand retour sur la place de la République à Caen », Liberté - Le Bonhomme libre, no 10178, , p. 17 (lire en ligne)
- ↑ « Enfants dénicheurs », sur À nos grands hommes (consulté le )
- ↑ « Enfants dénicheurs mordus par des serpents », sur À nos grands hommes (consulté le )
- « Centaure et bacchante », sur POP : la plateforme ouverte du patrimoine (consulté le )
- Georges Lafenestre, Le Livre d'or du Salon de peinture et de sculpture : catalogue descriptif des œuvres récompensées et des principales œuvres hors concours, Paris, Librairie des bibliophiles, (lire en ligne), p. 67
- ↑ Société d'archéologie et d'histoire de la Manche, Notices, mémoires et documents publiés par la Société d'agriculture, d'archéologie et d'histoire naturelle du département de la Manche, vol. 39, Saint-Lô, Imprimerie d'Elie fils, (lire en ligne), p. 147
- ↑ « Centaure enlevant une nymphe », sur Musée d'Orsay (consulté le )
Voir aussi
Articles connexes
- Liste des œuvres d'art de Caen
- Liste d'œuvres d'art rescapées de la fonte pendant l'Occupation
- Statue à Bertrand du Guesclin
Liens externes
- Ressource relative aux beaux-arts :