La Commission géodésique suisse est une commission de l’Académie suisse des sciences naturelles fondée en 1861 dans le cadre de l’Association pour la mesure de degrés en Europe centrale devenue plus tard l’Association géodésique internationale, puis l’Association internationale de géodésie[1].
Historique
La Commission géodésique suisse est créée durant la publication de la carte Dufour et ses premiers travaux contribueront à la conception de l'Atlas topographique de la Suisse.
Entre la fin du XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle, des mathématiciens tels Adrien-Marie Legendre et Carl Friedrich Gauss développent de nouvelles méthodes pour traiter les données, notamment la méthode des moindres carrés qui permet de comparer des observations entachées d'erreurs à un modèle mathématique[2]. Adrien-Maire Legendre publie en 1805 sa Nouvelle méthode pour la détermination des orbites des comètes et dans l'appendice décrit sa nouvelle méthode des moindres carrés, qui joue un rôle essentiel dans la réduction des données géodésiques. Il existe un litige concernant la priorité de l'invention de cette méthode. En effet, Carl Friedrich Gauss (1777–1855) affirme de son côté avoir inventé et utilisé la méthode des moindres carrés vers 1795 ; il en publie l'essentiel dans son ouvrage Theoria motus corporum celestium in sectionibus conicis solem ambientium, qui paraît en 1809.
La publication par Friedrich Wilhelm Bessel en 1838 de Gradmessung in Ostpreussen marque une nouvelle ère de la géodésie. On y retrouve la méthode des moindres carrés appliquée au calcul d’un réseau de triangles et à la réduction des observations en général. La manière systématique dont toutes les observations sont prises en compte en vue d’assurer les résultats finaux avec une extrême précision est admirable[3].
Dès la première moitié du XIXe siècle une détermination précise de la longueur d'un grand arc de méridien résulte de la mesure de l'arc géodésique de Struve (1816-1855), qui tire son origine du besoin des puissances européennes, après le congrès de Vienne en 1815, d'établir des frontières et des cartes militaires plus précises. Le tsar Alexandre Ier de Russie, qui s'associe aux monarchies scandinaves, charge l'astronome Friedrich Georg Wilhelm von Struve de réaliser la mesure d'un arc géodésique qui s'étend de Hammerfest en Norvège jusqu'à la mer Noire, sur plus de 2 800 km. Les données de cet arc n'invalident pas le mètre, mais mettent en évidence que les perfectionnements continuels des instruments scientifiques permettront de meilleures déterminations de la taille et de la forme de la Terre[4].
Les mesures géodésiques effectuée jusqu’à la moitié du XIXe siècle permettent d’établir que la Terre est un ellipsoïde de révolution aplati aux pôles. Friedrich Wilhelm Bessel et d’autres géodésiens ont proposé des ellipsoïdes de référence qui correspondent aux dimensions de l’ellipsoïde qui répondent le mieux à l’ensemble de ces mensurations. Toutefois, les géomètres ont également démontré que la figure de la Terre diffère sensiblement de cette forme géométrique. Friedrich von Schubert (1789–1865) démontre que tous les méridiens ne sont pas d'égale longueur, ce qu'avait envisagé Jean Le Rond d'Alembert qui avait également mis en question que les parallèles ne soient des cercles[5].
En 1860, Elie Ritter, en se basant sur les mêmes données que Schubert qui penche pour un ellipsoïde à trois axes inégaux, confirme l'hypothèse d'Adrien-Marie Legendre selon laquelle la forme générale de la Terre est celle d'un sphéroïde de révolution[6]. Toutefois l'année suivante, en se basant sur toutes les données disponibles à l'époque, Ritter arrive à la conclusion que le problème n'est résolu que de manière approximative, les données paraissant trop peu nombreuses, et en partie trop affectées par des causes locales, pour donner un poids suffisant au résultat. Selon son calcul, l'équation du méridien diffère de celle de l'ellipse et présente, vers le 45ème degré de latitude, un renflement dont l'épaisseur est difficile à déterminer en raison de l'incertitude concernant notamment la latitude de la station de Montjuïc[7].
En 1861, Johan Jacob Baeyer propose la création de l'Association pour la mesure des degrés en Europe centrale dont l'objectif est une nouvelle détermination des anomalies de la forme de la Terre au moyen de triangulations géodésiques précises, combinées à des mesures de la gravitation. Il s’agit de déterminer le géoïde au moyen de mesures gravimétriques et de nivellement, afin d’en déduire la connaissance exacte du sphéroïde terrestre tout en prenant en compte les variations locales[8].
Pour résoudre ce problème, il est nécessaire d’étudier avec soins et en tous sens des espaces considérables de terrain. Au printemps 1861, Baeyer élabore le plan de coordonner les travaux géodésiques de l’espace compris entre les parallèles de Palerme et Christiania (Oslo) et les méridiens de Bonn et de Trunz (nom allemand de Milejewo en Pologne). Ce territoire est couvert d’un réseau de triangle et comprend plus de trente observatoires ou stations dont la position est déterminée astronomiquement. Bayer propose de remesurer dix arcs de méridiens et un plus grand nombre d’arcs de parallèles, de comparer la courbure des arcs méridiens sur les deux versants des Alpes, afin de rechercher l’influence de cette chaîne de montagnes sur la déviation de la verticale. Il envisage également de déterminer la courbure des mers, de la Méditerranée et de l’Adriatique au sud, de la mer du Nord et de la Baltique au nord. Dans son esprit, la coopération de tous les États d’Europe centrale peut ouvrir le champ à des recherches scientifiques du plus haut intérêt, recherches que chaque État, pris isolément, n’est pas en mesure d’entreprendre[8].
Le 7 juillet 1861, la délégation de Prusse à Berne soumet le projet de Baeyer au Conseil fédéral. Le Département fédéral de l’Intérieur le soumet à Guillaume Henri Dufour, chef du bureau topographique fédéral. Lors de la session de la Société helvétique des sciences naturelles de 1861 à Lausanne, le projet discuté par la section de physique de la Société est vivement appuyé par Élie Ritter et par Adolphe Hirsch. Sur leur proposition, la Société décide de donner un préavis favorable à l’accession de la Suisse à l’Association pour la mesure des degrés en Europe centrale et de constituer la Commission géodésique suisse. Ses membres fondateurs sont Rudolf Wolf, président (Zurich), Guillaume Henri Dufour, président d’honneur et Élie Ritter, bientôt remplacé par Émile Plantamour (Genève), Adolphe Hirsch (Neuchâtel) et Hans Heinrich Denzler (Berne)[8].
La Commission géodésique suisse et la création du Bureau international des poids et mesures
En 1861, lors de la création de la Mitteleuropäische Gradmessung (Association pour la mesure des degrés en Europe centrale) par le général Johann Jacob Baeyer, Adolphe Hirsch devient l'un des membres fondateurs de la Commission géodésique suisse qu'il animera pendant quarante ans. Il prend part à la majeure partie des travaux géodésiques et a, en particulier, dirigé avec son collègue Émile Plantamour, directeur de l'observatoire de Genève, le nivellement de précision de la Suisse[9],[10]. La première assemblée générale de l'Association pour la mesure des degrés en Europe centrale a lieu à Berlin en 1864. Il y est décidé d'adopter la Toise de Bessel, une copie de la Toise du Pérou réalisée en 1923 par Jean-Nicolas Fortin à Paris[11], comme étalon international[12],[13].
La valeur de la Toise de Bessel, qui suivant le rapport légal alors admis entre le mètre et la Toise du Pérou, devait être égale à 1,9490348 m, se trouvera être de 26,2·10-6 m plus grande lors de mesures effectuées par Jean-René Benoît au Bureau international des poids et mesures. C'est la considération des divergences entre les différentes toises employées par les géodésiens qui amène l'Association pour la mesure des degré en Europe centrale à envisager, lors de la réunion de sa Commission permanente à Neuchâtel en 1866[14], la fondation d'un Institut mondial pour la comparaison des étalons géodésiques, premier pas vers la création du Bureau international des poids et mesures[15].
En 1864, dans son rapport à la Commission géodésique suisse sur la conférence de Berlin, Adolphe Hirsch évoque sa crainte que le choix de la Toise de Bessel comme étalon international ne détourne d'une adhésion à l'Association géodésique internationale la France, où la règle N° 1 de la double-toise de Borda utilisée pour la mesure de la méridienne de Jean-Baptiste Joseph Delambre et Pierre Méchain est alors la référence pour la mesure de toutes les bases géodésiques[16],[17], et les pays, qui, comme l'Espagne et les États-Unis, emploient le mètre[18],[19].
En 1866, la Commission permanente pour la mesure du degré dans l'Europe centrale se réunit à Neuchâtel, et Hirsch est désigné, avec Bruhns, de Leipzig, comme secrétaire de la session. L'année suivante, la même Commission, réunie à Berlin, vote une motion en dix articles jetant les bases de l'organisation internationale du système métrique, et prépare ainsi l’œuvre qui aboutit le à la signature de la Convention du Mètre. Pendant toute la période préparatoire, Hirsch montre une si grande activité, un esprit si clairvoyant, et s'identifie si bien avec l’œuvre commune, qu'il est, par un vote unanime, choisi comme secrétaire du nouveau comité chargé de la haute direction du Bureau international des poids et mesures. En même temps, naît de la Commission pour la mesure des degrés en Europe, l'Association géodésique internationale, et, par une entente dont on reconnaîtra ultérieurement les bons effets, on pense que les deux organisations nouvelles, dont la création est pour ainsi dire parallèle, gagneront à être dirigées par les mêmes hommes. Le général Carlos Ibáñez e Ibáñez de Ibero, directeur de l'Institut géodésique et statistique d'Espagne, est porté à la présidence des deux Commissions et Hirsch devient le seul secrétaire de l'Association géodésique internationale[20].
En 1867, la seconde Conférence générale de l’Association internationale de géodésie recommande l’adoption du mètre en remplacement de la toise[21]. En marge de l’Exposition Universelle de 1855 et du second Congrès statistique qui s'étaient tenus à Paris, une Association en vue de l’obtention d’un système décimal uniforme de mesures, poids et monnaies avait été créée en 1855[22],[23]. Sous l'impulsion de cette association, un Comité des poids, mesures et monnaies est créé lors de l'Exposition universelle de 1867 à Paris et appelle à l'adoption internationale du système métrique[24],[22].
En 1869, l’Académie des sciences de Saint-Pétersbourg envoie un rapport signé par Otto Wilhelm von Struve, Heinrich von Wild et Moritz von Jacobi invitant l’Académie des Sciences à une action commune en vue d’assurer l’usage universel du système métrique dans tous les domaines de la science[25]. La même année Napoléon III convoque la Commission internationale du mètre qui se réunit à Paris en 1870. La guerre franco-prussienne éclate. Le Second Empire s’effondre, mais le mètre survit[12],[26].
« Depuis l’origine, le mètre avait gardé une double définition ; il était à la fois la dix-millionième partie du quart du méridien et la longueur représentée par le Mètre des Archives. La première était historique ; elle a conservé une grande valeur pédagogique et de propagande, mais elle n’est pas métrologique. C’est ce qu’affirme Dumas après Jacobi, ce que l’Académie sanctionna d’un vote unanime, en déclarant que la longueur du Mètre des Archives devait être la seule représentation de l’unité métrique. Dès l’année 1870, une Commission internationale se réunit à Paris ; bientôt dispersée, elle se rassembla de nouveau en 1872. On discuta beaucoup, au sein de cette Commission, l’opportunité soit d’envisager comme définitives les unités représentées par les étalons des Archives, soit de revenir aux définitions primitives, et de corriger les unités pour les en rapprocher. La première solution prévalut, conformément au bon sens et conformément au préavis de l’Académie. Sur ce point fondamental, la Commission internationale n’a donc rien renversé et même rien innové. La définition historique du Mètre restait liée aux dimensions de la Terre ; sa représentation métrologique le rattachait à l’œuvre admirable de Delambre, Méchain, Borda, Lavoisier, et, pour le kilogramme, à celle, non moins surprenante, de Lefèvre-Gineau et Fabbroni. Abandonner les valeurs représentées par les étalons, c’eût été mutiler cette œuvre, et remplacer, au point de vue métrologique, un système parfaitement établi par un autre, à créer à nouveau ; c’eût été, en plus, consacrer un principe extrêmement dangereux, celui du changement des unités à tout progrès des mesures ; le Système métrique eût été perpétuellement menacé de changement, c’est-à-dire de ruine. C’est bien là qu’eût été, pour le système métrique, le réel danger. »[27]
— Charle Édouard Guillaume
En 1883, les frères Brunner construisent un comparateur pour le Bureau international des poids et mesures. Cet immense appareil est utilisé pour comparer les étalons du mètre destinés aux États parties à la Convention du Mètre. Pour cette réalisation Émile Brunner reçoit la croix de la Légion d'Honneur[28]. Le Bureau international des poids et mesures jouera un rôle central dans la mesures des bases géodésiques à l'échelle de la planète, car la découverte de l'invar par Charles Édouard Guillaume minimise l'impact des erreurs systématiques de température[24]. En 1920, Charles-Édouard Guillaume recevra le prix Nobel de physique. Le prix Nobel de physique décerné au cinquième directeur du BIPM marque la fin d’une époque durant laquelle la métrologie devient une discipline autonome dotée des moyens nécessaires pour dématérialiser la définition du mètre par des moyens technologiques. La métrologie quitte le giron de la géodésie pour devenir une application technologique de la physique[29].
Depuis la définition originale du mètre, chaque fois qu'une nouvelle mesure est effectuée, avec des techniques, des méthodes ou des instruments plus précis, on dit que le mètre est basé sur une erreur de calcul ou de mesure[30]. Lorsque Carlos Ibáñez e Ibáñez de Ibero, premier président de l'Association géodésique internationale et du Comité international des poids et mesures, participe à l'extension de la mesure de la méridienne de Delambre et Méchain, les mesures de la Terre soulignent l’importance de la méthode scientifique à une époque où les statistiques sont mises en œuvre en géodésie[2]. Carlos Ibáñez e Ibáñez de Ibero est l'un des 81 membres fondateurs de l'Institut international de statistique (ISI) et il est le délégué de l'Espagne à la première session de cette société scientifique à Rome en mars 1887[31],[32],[33].
Contribution à la mesure du champ de pesanteur de la Terre

Au XIXe siècle, les déviations de la verticale sont considérées comme des erreurs aléatoires[34]. Nous savons à présent, qu’en plus d’autres erreurs dans la mesure de la méridienne de France entre Dunkerque à Barcelone, une déviation de la verticale défavorable donna une valeur erronée de la latitude de Barcelone et un mètre trop court par comparaison avec une définition plus large déduite de la moyenne d’un grand nombre d’arc. Quoi qu'il en soit, la définition théorique du mètre était inaccessible et trompeuse à l’époque de Delambre et Méchain, car la Terre est une boule qui peut grossièrement être assimilée à un sphéroïde aplati, mais qui en diffère dans le détail de telle façon à empêcher toute généralisation et toute extrapolation à partir de la mesure d’un seul méridien[35].
En 1799, la distance du pôle Nord à l'équateur, extrapolée à partir de la mesure de l'arc du méridien de Paris entre Dunkerque et Barcelone, est déterminée comme équivalant à 5 130 740 toises[36]. Même avec les instruments disponibles lors de la mesure de la méridienne de Delambre et Méchain, l'erreur de 2 km dans la détermination de la longueur du quadrant terrestre est exagérée. Adrien-Marie Legendre en comparant les résultats de deux astronomes français à ceux de leurs prédécesseurs soupçonne que les irrégularités de l'attraction gravitationnelle locale sur le fil à plomb expliquent la détermination erronée de la longueur du mètre. En effet, alors que l'erreur due à la négligence des déviations de la verticale est responsable d'environ 95 % de l'erreur totale, l'erreur dans la mesure de la longueur du méridien représente moins de 2 % de l'erreur totale et l'erreur due à une hypothèse erronée sur la forme de la Terre contribue à environ 3 % de l'erreur totale. Si le travail minutieux de Méchain et Delambre était la seule source d'erreur, le mètre actuel ne serait trop long que de moins de 4 μm au lieu d'être trop court de 197 μm. L'essentiel de la différence est dû à la non-prise en compte des déviations de la verticale ; ce qui était hors de la portée de Jean-Baptiste Delambre et Pierre Méchain car le champ de gravité de la Terre n’avait pas encore été étudié[37].
Le pendule réversible construit par les fils de Johann Georg Repsold, selon les indications de Bessel, favorise l’essor de l’étude du champ gravitationnel de la Terre[38]. Dès 1864, le pendule réversible de Repsold-Bessel est utilisé en Suisse par Emile Plantamour[39]. De tels pendules ont également été construits par les frères Repsold pour la Prusse, l'Autriche, l'Italie, l'Espagne, les États-Unis, la Russie et la France[40].
Dans une de ses premières séances, au commencement de l'année 1862, la Commission géodésique suisse décide de comprendre la détermination de la pesanteur effectuée dans différents points de la Suisse, au nombre des opérations qui se rattachent à la mesure de l'arc de méridien traversant le centre de l'Europe, l'arc géodésique de Struve[39]. L'appareil utilisé pour ces déterminations est le pendule à réversion dont l'idée première revient à Johann Gottlieb Friedrich von Bohnenberger et sur la construction duquel Friedrich Wilhelm Bessel donne des indications très précieuse dès 1826. L'exécution d'un pendule à réversion, construit selon les principes indiqués par Bessel, est confiée aux célèbres artistes de Hambourg, les frères Repsold[38], et comme il est convenu que les premières observations soient faites à Genève, l'instrument y est envoyé à l'automne 1864. Émile Plantamour réalise ses premières expériences avec cet appareil entre la fin de l'année 1864 et le début de l'année 1865[39].
Le pendule réversible est utilisé en Suisse dès 1865 par Émile Plantamour pour la mesure de l'intensité de la gravité dans six stations du réseau géodésique helvétique. Sous le patronage de l'Association géodésique internationale, l'Autriche, la Bavière, la Prusse, la Russie et la Saxe entreprennent des déterminations de la gravité sur leurs territoires respectifs. Toutefois, les résultats obtenus avec ces gravimètres ne peuvent être considérés que comme provisoires. En effet, ils ne prennent pas en compte les mouvements que les oscillations du pendule impriment à son plan de suspension[38].
Les mouvements du plan de suspension constituent un facteur majeur d’erreur de mesure de la durée des oscillations et de la longueur du pendule. La détermination de la gravité par le pendule est soumise à deux types d’erreur systématique, la résistance de l’air et les mouvements que les oscillations du pendule impriment à son plan de suspension. Ces mouvements sont particulièrement amples avec le pendule de Repsold, car il a une importante masse, afin de contrecarrer l’effet de la viscosité de l’air. Alors que Émile Plantamour procède à une série d’expériences avec cet appareil, Adolphe Hirsch trouve le moyen de mettre en évidence les mouvements du plan de suspension du pendule par un ingénieux procédé d’amplification optique. Isaac-Charles Élisée Cellérier (8.01.1818 – 2.10.1889), un mathématicien genevois, et Charles Sanders Peirce mettent indépendamment au point une formule de correction qui permettra d’utiliser les observations faites avec ces gravimètres[38],[41].
En 1875, la Commission permanente de l’Association pour la mesure des degrés en Europe réunie à Paris décide d’adopter le pendule réversible utilisé en Suisse et de répéter à Berlin, la détermination de la gravité au moyen des différents appareils utilisés dans chaque pays, afin de les comparer et d’obtenir l’équation de leurs échelles[42]. Comme la figure de la Terre peut être déduite des variations de la longueur du pendule, la direction de l’United States Coast Survey donne dès 1875 à Charles Sanders Peirce l’instruction de se rendre en Europe, afin d’étudier les gravimètres utilisés dans les différents pays européens et de réviser les anciennes déterminations de la pesanteur de façon à les mettre en relation avec celles effectuées en Amérique[43].
Lors de l'exposition universelle de 1889, année de la première Conférence générale des poids et mesures, parmi les nombreux instruments géodésiques présentés par la maison Brunner Frères, la plupart réalisés pour le Bureau des longitudes, on peut admirer un pendule réversible conçu par Gilbert Étienne Defforges sur le modèle du pendule réversible construit par les frères Repsold pour Émile Plantamour[28]. En 1892, Gilbert Étienne Defforges mesure au Bureau international des poids et mesures la valeur de l'intensité de la pesanteur terrestre qui servira à définir l'accélération normale de la pesanteur terrestre lors de la 3ème Conférence générale des poids et mesures à Paris en 1901[44]. La même année, Friedrich Robert Helmert trouve essentiellement par la gravimétrie, des paramètres de l'ellipsoïde remarquablement proches de la réalité, soit un demi-grand axe égal à 6 378 200 m pour un aplatissement de la Terre de 1298,3. Ceci alors que l'analyse des premiers résultats issus des mesures par satellites fixeront cette dernière valeur à 1298,25[34].
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- ↑ « Report from Charles S. Peirce on his second European trip for the Anual Report of the Superintendent of the U. S. Coast Survey, New York, 18.05.1877 », sur Universidad de Navarra.
- ↑ Gilbert Étienne Defforges, « Mesure de l'intensité absolue de la pesanteur à Breteuil (Bureau international des Poids et Mesures). », sur Gallica, (consulté le ), p. 104-106