






Un hackathon, marathon de programmation[1],[2] ou programmathon[1] est un Ă©vĂ©nement durant lequel des personnes se rĂ©unissent pendant une courte pĂ©riode de temps, afin de travailler ensemble sur le dĂ©veloppement d'un projet. Souvent, le terme est employĂ© dans le contexte de la programmation informatique, quand ce sont des dĂ©veloppeurs qui se rĂ©unissent. Leur objectif peut alors ĂȘtre d'amĂ©liorer une application existante, ou encore d'en concevoir une nouvelle[3].
Un hackathon se dĂ©roule gĂ©nĂ©ralement sur une courte pĂ©riode de temps, de une Ă deux journĂ©es. Pour ĂȘtre le plus productifs, les participants travaillent autant que possible, quitte Ă sacrifier leur sommeil.
Les hackathons sont organisés par une grande variété d'organisations : universités, entreprises, associations... Parmi les universités en ayant organisé, on peut citer l'université Paris-Saclay[4] et le MIT avec le HackMIT (en). En France, des entreprises comme Axa ou la SNCF en ont organisé[5]. La Fondation Wikimédia organise annuellement un hackathon afin d'améliorer son infrastructure informatique. En 2025 se tient par exemple le Wikimedia Hackathon 2025.
Histoire du mot et du concept
[modifier | modifier le code]Le terme est un mot-valise constituĂ© de hack et marathon. La rĂ©fĂ©rence au marathon vient de l'endurance requise pour ĂȘtre productif sur toute la durĂ©e impartie.
Le hackathon est Ă l'origine un rassemblement de dĂ©veloppeurs. Leur objectif commun est de tester une idĂ©e et de produire un prototype d'application en quelques heures (principe du prototypage rapide)[3]. Sous forme de concours chronomĂ©trĂ©, l'Ă©quipe gagnante est gĂ©nĂ©ralement dĂ©signĂ©e par un jury Ă lâissue du temps imparti.
Il s'inscrit souvent dans des principes de coconception, d'économie du partage et d'économie collaborative[6]. S'y ajoute parfois une dimension artistique[7].
La méthode est souvent réutilisée par des entreprises et autres entités commerciales[8],[9],[10]. Ainsi, elle peut constituer une alternative aux méthodes classiques de développement de leurs systÚmes informatiques.
Déroulement type
[modifier | modifier le code]L'Ă©vĂ©nement a souvent lieu le weekend, pour permettre aux travailleurs salariĂ©s ou indĂ©pendants de se rendre plus facilement disponibles. Il peut ĂȘtre organisĂ© par une Ă©cole, une sociĂ©tĂ©, une administration[11]...
Il est préparé par une équipe et peut avoir été précédé d'une veille technologique ou d'un moment de préparation.
Aucune rĂšgle Ă©tablie ne rĂ©git ce type dâĂ©vĂ©nement. Cependant, chaque fois sây retrouvent ces points essentiels :
- Choix des projets par ceux qui le réalisent ;
- Délai de réalisation trÚs court ;
- Dynamique de groupe[12],[13] et enjeu d'émulation ou de compétition ;
- Obligation de produire un prototype qui fonctionne.
Déroulement type sur un weekend
[modifier | modifier le code]Vendredi soir :
- Présentation des données et moyens utilisables, des idées directrices ou objectifs recherchés (« pitch ») par les porteurs de projets ;
- Vote des participants (ceux qui vont dĂ©velopper) pour retenir un nombre de projets proportionnel au nombre de prĂ©sents, chaque projet retenu devant disposer dâau moins deux ou trois dĂ©veloppeurs. Parfois des formateurs ou des experts-invitĂ©s sont mis Ă disposition. Certaines techniques crĂ©atives peuvent ĂȘtre encouragĂ©es ;
- Constitution des équipes, et développement (pendant environ 48 heures). Parfois des observateurs peuvent intervenir ; rappeler le rÎle des brise-glace, des chefs d'équipe, du travail d'équipe...
Dimanche soir :
- Démonstration des prototypes de tout ou partie du projet devant un jury de spécialistes. Cela s'accompagne parfois d'un avis des autres équipes ou d'un public invité ;
- Remise des prix.
Valeurs
[modifier | modifier le code]La philosophie du hackathon prend sa source dans les idĂ©es des communautĂ©s de dĂ©veloppeurs du mouvement open-source (dĂ©veloppeurs estimant que leurs travaux peuvent ĂȘtre modifiĂ©s par quiconque). Comme pour le BarCamp, lâesprit communautaire est entretenu par le jeu consistant Ă relever des dĂ©fis en Ă©quipe (Ă©mulation), et par le partage d'un jargon technique, d'une expertise, voire d'un mode de vie particulier. Le hackathon est aussi une « plate-forme d'apprentissage » (par et avec les pairs[14]) plus ou moins « informelle »[15], un lieu oĂč l'on apprend en crĂ©ant et oĂč l'on entretient un « savoir informel »[16],[17]. LâexpĂ©rimentation et la sĂ©rendipitĂ© sont encouragĂ©es.
Lâouverture est un hĂ©ritage direct de lâesprit open source : elle se manifeste par la collaboration des participants.
Le mérite est le principal moteur des participants : ils chercheront à se distinguer des autres participants, à obtenir une reconnaissance de leurs expertises.
L'esprit d'Ă©mulation et la vitesse sont deux caractĂ©ristiques dĂ©terminantes de lâorganisation. Le dĂ©lai de rĂ©alisation extrĂȘmement court introduit une pression constructive dans les Ă©quipes. Il focalise les participants sur le rĂ©sultat final. Il exclut tout ce qui pourrait retarder la rĂ©alisation : Ă©tudes de faisabilitĂ©, discussions stĂ©riles. Dans la prise de dĂ©cisions, il redonne une place importante Ă lâinstinct et contribue Ă maintenir la concentration des dĂ©veloppeurs sur les tĂąches essentielles au fonctionnement gĂ©nĂ©ral du projet. En imposant le travail de nuit, il confĂšre un caractĂšre exceptionnel Ă lâĂ©vĂ©nement, renforçant probablement le plaisir dây participer.
Recherche en science sociale
[modifier | modifier le code]Le hackathon, en tant que phĂ©nomĂšne Ă©mergent oĂč se croisent et se forment des expertises (en design, informatique, industrie...) est aussi devenu un sujet de science sociale et de recherche[3].
La littérature disponible le cite de plus en plus comme source avérée d'innovation[18] et de développement d'une nouvelle forme d'« entrepreneuriat citoyen »[19].
Analyse de Gerard Briscoe et Catherine Mulligan
[modifier | modifier le code]Selon les chercheurs Gerard Briscoe et Catherine Mulligan, le hackathon est « beaucoup plus intense que tout autre événement de réseautage » ; c'est certes un lieu de prototypage de projets concrets, mais c'est « aussi un exercice de prototypage de nouvelles relations de travail et/ou de collaborations personnelles pour les participants ». Ainsi, il s'agit d'une « occasion unique de réseautage », « souvent à échelle internationale »[3].
Ces événements ont généralement un caractÚre trÚs « masculin » de ces événements, qui pourraient découler de problÚmes généraux d'inclusivité des deux genres dans la société, ou de problÚmes plus spécifiques aux domaines de l'informatique[20], des technologies, de la participation aux sciences informatiques[3].
Le bien commun (ressources diverses et biens culturels), au cĆur de la culture des hackers, est utilisĂ© et valorisĂ© par certains hackathons centrĂ©s sur des sujets culturels (« Culture Hacks » pour les anglophones)[3].
Espionnage
[modifier | modifier le code]Des allĂ©gations d'espionnage touchent certains hackathons, notamment ceux ayant trait au secteur de la dĂ©fense. En 2025, lors de deux hackathons dĂ©veloppant des technologies en soutien Ă l'Ukraine, lors desquels sont prĂ©sents des membres du ministĂšre ukrainien de la DĂ©fense, l'Amt fĂŒr den MilitĂ€rischen Abschirmdienst (contre-espionnage allemand) arrĂȘte ou place sous surveillance des participants d'origines russe et taĂŻwanaise, soupçonnĂ©s de vouloir collecter du renseignement ou effectuer des actes de sabotage contre les projets dĂ©veloppĂ©s[21].
Critiques
[modifier | modifier le code]Une limite essentielle est le manque de temps qui peut empĂȘcher le prototypage des projets trop complexes. NĂ©anmoins, le hackathon est souvent un lieu et un moment oĂč de tels projets (de plus long terme) peuvent naĂźtre.
Il est reprochĂ© au hackathon d'ĂȘtre un moyen d'enrĂŽler ou de faire travailler des gens sans les payer. Un autre reproche est l'exploitation de leur crĂ©ativitĂ© au profit d'innovations Ă©ventuellement rĂ©cupĂ©rĂ©es ou brevetĂ©es, parfois mĂȘme pour en tirer des profits[22],[23]. C'est une des raisons qui font que certains participants apprĂ©cient que le rĂ©sultat de leurs travaux soit ensuite disponible en open source et open data, afin qu'il reste dans le bien commun. La question de la propriĂ©tĂ© intellectuelle d'innovations ainsi produites en commun n'est malheureusement pas toujours abordĂ©e.
Exemples
[modifier | modifier le code]Notes et références
[modifier | modifier le code]- Commission dâenrichissement de la langue française, « marathon de programmation », sur FranceTerme, ministĂšre de la Culture (consultĂ© le ).
- â Office quĂ©bĂ©cois de la langue française, « Fiche terminologique », sur gdt.oqlf.gouv.qc.ca.
- (en) Gerard Briscoe et Catherine Mulligan, « Digital innovation: The hackathon phenomenon » [PDF], sur Queen Mary University of London, .
- â « Hack'in Pharma 2025 », sur universitĂ© Paris-Saclay].
- â Lucie Ronfaut, « Comment le «hackathon» rĂ©invente l'innovation en entreprise », Le Figaro,â (lire en ligne
, consulté le ).
- â Richardson, L. (2015). Performing the sharing economy. Geoforum, 67, 121-129
- â Page F, Sweeney S, Bruce F & Baxter S (2016) The use of the hackathon in design education : An opportunistic exploration. In DS 83: Proceedings of the 18th International Conference on Engineering and Product Design Education (E&PDE16), Design Education: Collaboration and Cross-Disciplinarity, Aalborg, Denmark, 8th-9th September 2016|PDF|6pages.
- â Munro D (2015) Hosting hackathons a tool in retaining students with beneficial side effects. Journal of Computing Sciences in Colleges, 30(5), 46-51 (rĂ©sumĂ©).
- â M. Calco and A. Veeck. The Markathon: Adapting the Hackathon Model for an Introductory Marketing Class Project. Marketing Education Review, 2015
- â Briscoe, G., Hon, J. X., & Creatives, B. Choreograthons: Hackathons for Dance Composition (rĂ©sumĂ©)
- â « Concours - Hackathons », sur Programmez! (consultĂ© le ).
- â S. Hooper (1991) Effects of Group Composition on Achievement, Interaction & Learning Efficiency. ETRD, .
- â Lederman O (2015) Hacking innovation-group dynamics in innovation teams (Doctoral dissertation, Massachusetts Institute of Technology).
- â D. Boud, R. Cohen, and J. Sampson. Peer Learning in Higher Education: Learning from and With Each Other. Routledge, 2014.
- â Nandi, A., & Mandernach, M. Hackathons as an Informal Learning Platform (rĂ©sumĂ©).
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- â J. Grimes et al. (2008), Robotics Competition: Providing Structure, Flexibility, and an Extensive Learning Experience. FIE, .
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- â L. Blum, C. Frieze, et al. A Cultural Perspective on Gender Diversity in Computing. SIGCSE, 2006
- â GrĂ©gory Priolon, « Allemagne/Ukraine âą Le contre-espionnage allemand traque les espions infiltrĂ©s dans des hackathons », Intelligence Online, (consultĂ© le )
- â Eben Moglen. Innovation under austerity (keynote). In F2C:Freedom to Connect, 2012.
- â Erin Griffith, « Sociologists Examine Hackathons and See Exploitation », Wired,â (ISSN 1059-1028, lire en ligne, consultĂ© le )
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- Samuel Poiraud, « Hackathon â 1er prix pour lâĂ©quipe de lâESEO », sur projets.eseo.fr, (consultĂ© le )
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- J. A. Artiles and D. R. Wallace. Borrowing from Hackathons: Overnight Designathons as a Template for Creative Idea Hubs. WEEF, 2013.
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