Orgue Casavant, Opus 600, de l'église Très-Saint-Nom-de-Jésus | ||
Buffet de l'orgue du chœur de l'église Très-Saint-Nom-de-Jésus | ||
Localisation | ||
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Pays | Canada | |
Région historique | Province de Québec | |
Commune | ||
Édifice | Église Très-Saint-Nom-de-Jésus | |
Facteurs | ||
Construction | 1915 Casavant frères | |
Reconstruction | 1985-1999 et 2019 Casavant frères | |
Caractéristiques | ||
Jeux | 91 | |
Claviers | 4+2 + pédaliers | |
Tuyaux | ~6219 | |
Transmission | Électropneumatique | |
Tirage des jeux | Électrique | |
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L’orgue de l’église du Très-Saint-Nom-de-Jésus, à Montréal, dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, est un orgue Casavant constitué, à proprement parler, de deux instruments distincts, un orgue de tribune comportant 70 jeux et un orgue de chœur de 21 jeux. Les deux instruments sont commandés par deux consoles autonomes, mais coordonnées.
Historique
L'orgue de Très-Saint-Nom-de-Jésus, inauguré en 1915, était à l'époque le plus important de Montréal et le dixième plus grand en Amérique[1]. Conçu par la maison Casavant Frères, facteur d'orgues de Saint-Hyacinthe, il a fallu cinq wagons pour transporter les pièces jusqu'à Maisonneuve (ancienne appellation de la ville qui sera annexée à Montréal en 1918).
Toutefois, il ne s'agit pas du premier orgue de cette paroisse. En 1899[2], le curé Joseph-Avila Bélanger commande un orgue pour la chapelle de la paroisse. Celle-ci cédera sa place à l'imposante église aux allures de cathédrale où se trouve maintenant l'Opus 600 inauguré en 1915[3].
L'harmonisation finale fut confiée à une équipe sous la direction de Joseph-Claver Casavant, un des frères dirigeant la compagnie portant leur nom. Le buffet majestueux de l'orgue, d'une grande élégance, a été dessiné par l'architecte Joseph-Henri Caron (1877-1954) et réalisé par la maison Louis Caron & Fils, de Nicolet. C'est Toussaint-Xénophon Renaud, maître d'œuvre de la décoration de l'église, qui eut la tâche de le peindre[4].
Dès sa création, l'instrument récolte des éloges. Le plus grand organiste canadien de l'époque, Lynnwood Farnam (1885-1930) touche le clavier de l'Opus 600 le 5 juillet 1915, impressionné, il écrira aux frères Casavant: « J'ai joué hier votre orgue opus 600 dans la grande église de Maisonneuve. Je tiens à vous écrire pour vous dire le plaisir que j'y ai pris...J'ajouterai seulement que l'équilibre et la finesse d'exécution sont partout apparents. » Farnam, titulaire de l’orgue de l’église épiscopalienne Emmanuel à Boston commandera en 1917 à Casavant Frères un modèle semblable[5].
Pour son inauguration officielle, le 22 octobre 1916[6], on fait appel à l’organiste belgo-américain Charles Courboin (1884-1973). Celui-ci était à l’époque rattaché à l’orgue du magasin Wanamaker de Philadelphie, le plus gros instrument au monde. Devenu plus tard titulaire à la célèbre église St. Patrick’s de New York, il reviendra parfois à Très-Saint-Nom-de-Jésus. Le concert qu’il donne le 3 septembre 1936 est transmis sur l’ensemble des réseaux radiophoniques d’Amérique du Nord, atteignant un auditoire potentiel de 35 millions de personnes[7].
D’autres célèbres organistes vinrent donner des concerts à Très-Saint-Nom-de-Jésus, attirés par la réputation enviable de son orgue, notamment Joseph Bonnet [8] titulaire à l’église Saint-Eustache à Paris, le 27 mai 1917, et Marcel Dupré [9],[10],[11]titulaire à l’église Saint-Sulpice, également à Paris, le 17 octobre 1922.
Dans les années 60, après Vatican II, suivant les changements à la liturgie et les nouvelles mentalités, s’ajoutant à la désaffection des églises par les fidèles, les orgues perdent de leur prestige et les paroisses n’ont plus les moyens de les entretenir. L’orgue de Très-Saint-Nom-de-Jésus n’échappe pas à cette hécatombe et cesse de fonctionner en 1972. L’organiste Sylvie Poirier (décédée en 2013) en sera alors la dernière titulaire.
Restauration
En 1982, un comité du quartier Hochelaga-Maisonneuve, présidé par Jean-Yves Marsan, proposa de créer un organisme à but non lucratif pour la restauration de l’orgue[4],[12]
Des experts furent consultés pour fournir un devis, le comité mis en place par Christopher Jackson et dont il faisait partie, était composé des organistes Gaston Arel, Pierre Grandmaison et Jacques Boucher.
L’organologue Massimo Rossi va entreprendre un examen complet de la tuyauterie. Un rapport sera par la suite rédigé par ce comité, qui va proposer, tout en préservant le côté patrimonial de l’instrument, de lui redonner une esthétique symphonique française et l’harmonisation chère au grand facteur français Aristide Cavaillé-Coll.
La réalisation du projet s’étalera sur près de 15 ans. Au cours de la première étape, en 1985-1986[13], les jeux du Grand orgue sont remis en état, de même que la console. Le manque de fonds impose alors une suspension des travaux jusqu’en 1995. Grâce à une importante mobilisation citoyenne, les étapes subséquentes peuvent alors être complétées : restauration des claviers de récit, positif et solo; restauration de l’orgue de chœur. La rénovation des jeux de pédale s’est faite progressivement au cours de ces phases. On ajoute aussi une deuxième console dans la nef, sur une plateforme mobile.
Il est à noter que la députée provinciale de la circonscription d’Hochelaga, Louise Harel, a travaillé d’arrache-pied pour réunir les fonds nécessaires à cette grande entreprise de restauration.
En 1985, on s'occupe du clavier de Grand orgue et de la console de tribune. Dix ans plus tard, on s'attaque progressivement aux autres claviers et, finalement, à l'orgue de chœur. Une deuxième console dans la nef, sur une plateforme mobile, est alors ajoutée.
Les travaux se terminent en 1999[14].
L’instrument comporte dorénavant 91 jeux dont 70 à l’orgue de la tribune et 21 à l'orgue de chœur.
Afin de célébrer cette grande réalisation, Régis Rousseau[15], le titulaire de l’orgue, va organiser le Festival Orgue et couleurs[16] en 1999, mettant en vedette le nouvel instrument dans une série de concerts, de Matchs d’improvisation à l’orgue, le tout se poursuivant durant dix jours.
Pendant plus de onze ans, Orgue et couleurs[17] sera un pôle de la vie culturelle de l’est de Montréal[18]. À compter de l’été 2003, il se voit confier la présentation des Concerts populaires de Montréal[19]. Année après année, leur succès ne s’est jamais démenti. La fermeture de l’église du Très-Saint-Nom-de-Jésus, en juin 2009, met en péril toutes ces entreprises musicales[20]. À sa réouverture au culte le 24 décembre 2014, il faut se rendre à l’évidence que les orgues ont souffert des piètres conditions de conservation et une nouvelle restauration, beaucoup moins importante que la précédente, est effectuée en 2019[21].
En août 2018, la Société des orgues de Maisonneuve est fondée pour voir à la promotion et à l’entretien des orgues. Elle présente chaque année une saison de récitals, à laquelle s’ajoutent diverses activités d’animation culturelle[22].
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Notes et références
- Antoine Leduc, « Orgues du Québec: instruments et œuvres d'art », sur erudit.org, continuité, numéro 91, hiver 2001-2002 (consulté le )
- La Patrie, « Dans la banlieue: La fête de demain à Maisonneuve », sur banq.qc.ca, (consulté le )
- Le Devoir, « Les grandes orgues de Maisonneuve: un "Casavant" de proportions héroïques », sur banq.qc.ca, (consulté le )
- André Croteau, « Église Très-Saint-Nom-de-Jésus », sur musiqueorguequebec.ca, (consulté le )
- Casavant Frères, « Archives Casavant Frères », sur casavant.ca, (consulté le )
- Le Devoir, « Les orgues de Maisonneuve: L'inauguration en a été faite hier par M. Charles Courboin-Allocutions de M.F.X. de Ladurantaye », sur banq.qc.ca, (consulté le )
- La Patrie, « M. Charles Courboin se fera entendre par 35,000,000 d'auditeurs », sur banq.qc.ca, (consulté le )
- Le Devoir, « M. Joseph Bonnet à Maisonneuve », sur banq.qc.ca, (consulté le )
- Le Devoir, « La vie musicale - Marcel Dupré », sur banq.qc.ca, (consulté le )
- "M. Marcel Dupré à Maisonneuve", La Presse, le 14 octobre 1922, page 14.
- "M. Marcel Dupré à Maisonneuve", Le Devoir, le 14 ocotobre 1922, page 6.
- Pierre Baraby, « La restauration des grandes orgues de Très-Saint-Nom-de-Jésus: on pourra aller de l'avant », Nouvelle de l'Est, 30 0ctobre 1984, page 3
- Ministère de la culture et des communications du Québec, « Orgue (Casavant, Opus 600 », sur https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/, (consulté le )
- Clément Trudel, « L'opus 600 de Casavant: L'un des plus célèbres orgues de Casavant & Frères reprend vie dans une église de l'est de Montréal. », Le Devoir,
- François Tousignant, "Régis Rousseau: Un passionné qui partage sa passion", Le Devoir, 21 septembre 2002, H2
- Antoine Leduc, « Festival Orgue et couleurs 2001: hommage aux "révolutionnaires" de l'instrument roi !. », sur www.scena.org, (consulté le )
- Le Devoir, cahier du 21 septembre 2002, Cahier H (entièrement consacré au festival Orgue et couleurs).
- Le Devoir, « Orgue et couleurs, cahier H en entier », Le Devoir, 21 et 22 septembre 2002
- Clairandrée Cauchy, "Un projet populaire pour le quartier Hochelaga", Le Devoir, le 21 septembre 2002, Cahier H3
- Isabelle Paré, « Église du Très-Saint-Nom-de-Jésus-Montréal recommande la sauvegarde de l'orgue et de l'église », sur ledevoir.com, (consulté le )
- Mario Cloutier, « Les orgues de l'église Très-Saint-Nom-de-Jésus ressucitent », sur ludwig-van.com, (consulté le )
- Lettres patentes émises pour la Société des orgues de Maisonneuve, le 29 août 2018, au Registraire des entreprises, Gouvernement du Québec. no 1173925323 (information fournie par Paul Cadrin, Vice-Président du CA de la Société des orgues de Maisonneuve, le 4 août 2024)
- (en) Pipe Organs database, « Casavant Frères Ltée-Opus 600 », sur pipeorgandatabase.org, ? (consulté le )
Bibliographie
Le concert d'orgue au cœur de notre vie musicale, Paul Cadrin, Montréal, Les éditions GID, 2024, 372 p., (ISBN 9782896345526)
Les belles église du Québec (Montréal), André Croteau, Montréal, Trécarré, 1996, 222 p., (ISBN 9782892496628)