Domaine d'activité |
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Une société savante, qui souvent aussi portait le nom de société d'émulation, est une association d’érudits ou de scientifiques de plusieurs disciplines : lettres, sciences et arts.
Une société savante est généralement une association regroupant des experts et des amateurs éclairés qui font et publient des travaux de recherche originaux (souvent publiés dans une revue éditée par l'association elle-même). Par leurs travaux et leur réflexion, ces sociétés font avancer la connaissance dans leur domaine d'activité et jouent souvent un rôle important d'archivage et valorisation de savoirs et savoir-faire locaux.
Elles travaillent souvent avec les musées, les écoles, universités, et en relation avec d'autres sociétés savantes ou des experts faisant référence. En France, elles peuvent faire don de leurs fonds aux archives départementales.
Il existe également des sociétés savantes nationales qui fédèrent la communauté scientifique d'une discipline au sens large : chercheurs, enseignants, étudiants, amateurs… Des fédérations de sociétés savantes nationales d’un même domaine scientifique existent à l’échelle européenne ou internationale.
En France, entre 1861 et 1992, se tenait à Paris un Congrès annuel des sociétés savantes (sous l'égide du ministère de l'Instruction publique).
En 1993, il est devenu « Congrès national des sociétés historiques et scientifiques », et entre-temps, il a parfois été aussi nommé « Congrès des sociétés savantes, Congrès des sociétés savantes de Paris et des départements de France, Comité des travaux historiques et scientifiques, Congrès national des sociétés savantes »[1].
Sociétés savantes nationales et internationales
En France, certaines sont très importantes comme la Société mathématique de France ou la Société française de physique. Elles organisent des conférences et des congrès, décernent des prix et allouent des bourses.
En Europe, de nombreuses sociétés savantes nationales d’un même domaine sont structurées en fédération, qui organisent des congrès à l’échelle européenne, ouverts aux chercheurs de nombreux pays, par exemple :
- La Société mathématique européenne, dont sont membres la Société mathématique de France, la Société de mathématiques appliquées et industrielles et la Société française de statistique ;
- La Fédération européenne des sociétés de biochimie (en anglais : Federation of European Biochemical Societies) (FEBS), dont la Société française de biochimie et de biologie moléculaire est la branche française (SFBBM) ;
- La Société européenne de physique, dont est membre la Société française de physique ;
- La Fédération européenne des sociétés d'immunologie (en anglais : European Federation of Immunological Societies) (EFIS), dont est membre fondateur la Société française d'immunologie ;
Il en est de même à l'échelle internationale, regroupées en fédérations ou unions scientifiques :
- Union mathématique internationale (en anglais : International Mathematical Union) (IMU) ;
- Union internationale de chimie pure et appliquée (IUPAC) ;
- Union internationale de biochimie et de biologie moléculaire (en anglais : International Union of Biochemistry and Molecular Biology) (IUBMB), à laquelle sont affiliés les membres de la SFBBM ;
- Union internationale des sociétés d'immunologie (en anglais : International Union of Immunological Societies) (IUIS), dont est membre fondateur la Société française d'immunologie ;
Elles jouent souvent des rôles importants :
- dans la définition de standards internationaux telle que la nomenclature de l'UICPA des molécules chimiques ;
- l'attribution de prix prestigieux, comme la médaille Fields en mathématiques par l'IMU.
Histoire
En France, l'essor des sociétés savantes date du XVIIIe siècle ; ces associations ont beaucoup contribué au rayonnement de la science dans les régions françaises, et à la diffusion des thèmes chers au siècle des Lumières. Elles ont parfois réuni d'importants fonds d'archives de grand intérêt historique et scientifique.
Adeptes du travail collaboratif, elles se réunissent autour de thèmes divers concernant souvent l'étude du patrimoine culturel régional et en particulier le patrimoine paléontologique et archéologique. L'archéologie était autrefois appelée « antiquité », d'où le nom de sociétés d'antiquaires qui était porté par des groupes d'historiens et parfois de archéopaléontologues[2].
Certaines sociétés ont constitué d'importantes bibliothèques, notamment par échanges et acquisition réciproques d'ouvrages et revues avec de nombreuses autres sociétés correspondantes, dont certaines aujourd'hui disparues ou situées dans de nombreux pays étrangers (documents qu'on ne trouve pas à la Bibliothèque nationale de France).
Récemment, elles ont étendu leur champ de recherche, par exemple vers l'écologie, la sociologie du travail ou l'histoire syndicale et industrielle[3].
Les correspondances des sociétés savantes sont elles-mêmes devenues des témoins historiques intéressants[4].
Soutiens
Publics
En raison de la richesse et parfois de la fragilité de leur patrimoine, certaines de ces sociétés bénéficient encore d'un certain soutien du Comité des travaux historiques et scientifiques en France. Celui-ci publie, à travers sa fondation (la fondation des travaux historiques et scientifiques, abritée par l'Académie des sciences morales et politiques) chaque année un appel à projets qui permet aux sociétés savantes de bénéficier d'aides financières[5]. Par ailleurs, il organise des journées d'études afin d'apporter des réponses aux problèmes que les sociétés savantes rencontrent (le numérique, la gestion du patrimoine, etc.) : tous les documents présentés à l'occasion de ces moments de réflexion sont mis à la disposition du public grâce au forum des sociétés savantes[6].
Ces sociétés peuvent, lorsqu'elles disposent de fonds précieux, être aidées pour les numériser. Ainsi en France, la base Gallica a-t-elle numérisé des périodiques des sociétés savantes de Lorraine et d’Aquitaine, aux frais de la Bibliothèque nationale de France, les rendant ainsi accessibles et téléchargeables gratuitement sur Internet.
Privés
De nombreuses sociétés savantes en lien avec l'agriculture, l'alimentation et la médecine sont parrainées par des groupes industriels (lobbys)[7]. Par exemple, en 2017, la Société française de nutrition a reçu des dizaines de milliers d'euros de l'industrie agroalimentaire et de l'industrie pharmaceutique[7]. Et les trois quarts du budget de la Société européenne de cardiologie proviennent de l'industrie pharmaceutique[8].
Les personnes adhérentes d'une société savante paient en général une cotisation. Lorsque la société est déclarée d'intérêt général ou reconnue d'utilité publique, en France, la cotisation ouvre droit à réduction d'impôt (66 % du montant de l'adhésion ou du don).
Congrès des sociétés savantes
France
Il existe un annuaire informatique des sociétés savantes de France[9], créé par le Comité des travaux historiques et scientifiques (CTHS)[10]. Sa dernière édition papier date de 1996[11].
Congrès national des Sociétés historiques et scientifiques
Le Comité des travaux historiques et scientifiques (CTHS)[12] tient un congrès chaque année dans une ville universitaire française. Le congrès national des Sociétés historiques et scientifiques[10] est interdisciplinaire. Il a pour mission de favoriser les échanges entre :
- la recherche associative ;
- les études doctorales ;
- la recherche universitaire.
Le 139e congrès s'est tenu à Nîmes du 5 au sur le thème « Langages et communication »[13].
Tendances et prospectives
À partir des années 2000, un vieillissement des membres des sociétés savantes s'est produit, à la suite de l'arrivée de la génération du papy-boom, et d'un relatif désintéressement des jeunes pour ce type de cadre.
Les progrès de l'informatique et la démocratisation de l'Internet dans les années 1990-2000 ont cependant bouleversé les pratiques de certaines sociétés savantes, et ont notamment permis l'émergence d'une science citoyenne, auxquelles de nombreuses sociétés savantes se sont associées, parfois au travers de nouveaux réseaux internationaux[réf. nécessaire].
Par exemple, alors que l'enseignement de la botanique et des sciences naturelles diminuait dans les universités et écoles au profit de la biologie moléculaire, la génétique paraissant plus rentable, une structure comme Tela-botanica a regroupé en une décennie environ 11 000 botanistes francophones, dans 35 pays ; auto-organisés autour d'outils de travail collaboratif.
Notes et références
- « Congrès national des sociétés savantes », sur data.bnf.fr (consulté le )
- On peut ainsi citer la Société des antiquaires de la Morinie ou la Société des antiquaires de Picardie. Cette dernière fut à l'origine du Musée de Picardie à Amiens donné à la ville d'Amiens le 18 mai 1869 et dont le « fonds photographique »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) est aujourd'hui accessible en ligne.
- [PDF]Article de Dominique Barjot, Un champ pionnier pour les sociétés savantes : mémoire et archives d’entreprises.
- Christiane Demeulenaere-Douyère, Correspondances et manuscrits des sociétés savantes : les conserver, les classer, les signaler (Voir [PDF]page 15 de ce document)
- « CTHS - Fondation et autres prix », sur cths.fr (consulté le )
- « cths.fr - Le forum du cths et des sociétés savantes », sur forum.cths.fr (consulté le )
- Stéphane Horel, Lobbytomie : comment les lobbies empoisonnent nos vies et la démocratie, Paris, La Découverte, , 368 p. (ISBN 978-2-7071-9412-1), p. 176-177.
- Andreas Gossweiler, « Médicaments anticholestérol : soigner ou vendre plus ? », Ma santé, , p. 27.
- Annuaire informatique des sociétés savantes de France
- Comité des travaux historiques et scientifiques
- Bulletin de l'association culturelle du Pays de Savignac (voir l'introduction)
- Site du Cths
- Programme du congrès 2014 du Cths
Voir aussi
Bibliographie
- Henri Amouroux (dir.), Histoire des cinq académies, Paris, Librairie académique Perrin, , 464 p. (ISBN 978-2-262-01158-1, OCLC 171109080).
- Christiane Demeulenaere-Douyëre (dir.) et Éric Brian (dir.), Histoire et mémoire de l'Académie des sciences : guide de recherches, Londres Paris New York, Technique & Documentation, , 450 p. (ISBN 978-2-7430-0148-3, OCLC 895651384, présentation en ligne).
- Henri Carnoy, Dictionnaire biographique des membres des sociétés savantes, H. Carnoy, , 256 p. (OCLC 252753323).
- Jean-Pierre Chaline, Sociabilité et érudition : les sociétés savantes en France : XIXe – XXe siècles, Paris, Éd. du CTHS, , 270 p. (ISBN 978-2-7355-0310-0, OCLC 470398780).
- Jean-Pierre Chaline, Les sociétés savantes, Aubier-Montaigne, Paris, 1999. Livre de synthèse, devenu une référence pour le sujet (comme le précédent).
- Pierre Gauja, L’Académie des Sciences et l'Institut de France, Gauthier-Villars, , 143 p. (OCLC 256995720).
- Ernest Maindron, Histoire de l'Académie des Sciences, Alcan, , 344 p. (OCLC 561402301).
- Daniel Schweitz, Historiens, « antiquaires » et archéologues de la Société archéologique de Touraine. Répertoire biographique et bibliographique (1840-2018), in Mémoires de la Société archéologique de Touraine, LXXVII, 2020, 291 p., ill.
Articles connexes
- Liste de sociétés savantes d'histoire et d'archéologie en France
- Siècle des Lumières
- Académie française
- Académie des sciences
- Congrès scientifique
- Communauté scientifique
- Fellow
- Revue scientifique
- Science citoyenne
- Travail collaboratif
- Association loi de 1901
- Science
- Organisation professionnelle
- Liste de sociétés savantes
- Liste de sociétés savantes de France
- Liste des sociétés savantes de Bretagne
- Liste de sociétés savantes de Savoie
- Liste de sociétés savantes de Suisse
- Érudition
- Société d'émulation
Liens externes
- « Sciences au XIXe siècle : un travail d’amateurs ? », Sciences chrono, France Culture, 13 septembre 2024.
- Dossier « Sociétés savantes » (France), sur Gallica
- Bulletin (en ligne) de liaison des sociétés savantes organisé par le CTHS et consacré au thème : « Les fonds patrimoniaux des sociétés savantes : conservation, préservation, inventaire » (à la suite de la journée d'étude du , consacrée à ce thème)
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :