Agurzil | |
Dieu de la mythologie berbère | |
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![]() Symbole de Gurzil sur un tambeau à Tiddis[1],[2],[3] | |
Caractéristiques | |
Autre(s) nom(s) | Gurzil |
Fonction principale | Dieu du tonnerre et de la guerre |
Représentation | taureau[4] |
Résidence | Tamazgha |
Lieu d'origine | Libye antique |
Période d'origine | Antiquité berbère |
Équivalent(s) | Arès, Mars, Thor, Indra |
Culte | |
Région de culte | Libye antique |
Temple(s) | Iol, Tiddis, Ghirza, Agadir |
Lieu principal de célébration | Agadir |
Date de célébration | Biyelmawn |
Famille | |
Père | Zeus Ammon |
Mère | une génisse |
Fratrie | Iarbas |
Symboles | |
Animal | Taureau |
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Gurzil, Gourzil ou Agurzil (en berbère ⴰⴳⵓⵔⵣⵉⵍ)[5],[6] est le dieu du tonnerre et de guerre[7]dans la mythologie berbère[8],[9], représenté par une tête de taureau. Il est né de l’accouplement du dieu Ammon et d’une génisse[10],[11]. On dit que le dieu était vénéré sous la forme d’une idole en pierre (similaire à celle trouvée à Tiddis, Algérie) sur une colline nommée « Gurza » (Ghirza)[12] à Tripoli, Libye, où 51 taureaux y étaient sacrifiés accompagnés de prières pour guérir les maladies et attirer la richesse[13],[14].
Gurzil était souvent assimilé au dieu grec Apollon[12]. Ierna, un chef berbère des Laguatans, a été un grand prêtre connu de Gurzil[15].
Historique
Le dieu Gurzil est connu par deux sources : le poème latin Iohannis du poète chrétien romain du VIe siècle Corippus et une inscription néopunique retrouvée à Leptis Magna[16],[17],[18]. Le dieu est utilisé par la tribu berbère laguatan lors de ses batailles contre les Byzantins au vie siècle. Au moment d’engager le combat, les Laguatans lâchent sur leur adversaire un taureau représentant le dieu Gurzil[19]. Au vie siècle, le poète byzantin Corippe mentionne que Ierna — le chef de la tribu des Laguatans — utilise Gurzil lors de ses batailles contre les Byzantins. Ierna est aussi grand prêtre de « Gurzil, fils d'Ammon »[20],[17],[21],[22]. Des idoles laguatanes en bois et en métal seraient celles de Gurzil[23]. Corippe avance que lors d'un affrontement entre les Romano-Byzantins et les Maures, Ierna, grand prêtre des Maures et roi des Ilaguas/Lévathes, lança un taureau sacré contre les lignes romaines[24]. Les deux armées essayèrent de s'impressionner par des cris et des invocations, les Maures d'Antalas évoquèrent le dieu Gurzil tandis que du côté romain une prière fut criée : « Que le Christ, au grand courage, combatte pour tes armes, Justinien, avec sa puissance. Père très bon, protège le pouvoir de notre empereur. »[25], à la suite de quoi, javelots et flèches furent lancées et les deux camps reçurent presque autant de blessures[26].
Après sa défaite finale en 547, Ierna s'enfuit avec « l'image sacrée » de Gurzil, mais est capturé et tué par les forces byzantines, et « l'image » détruite[27]. Après la conquête byzantine des Laguatans, Sergius, un dux byzantin, leur avait juré une protection sous les Saintes Écritures. Cependant, un massacre de masse de 79 sous-chefs s'ensuivit, déclenchant une rébellion laguatan qui dura quatre ans. La révolte fut finalement écrasée et le temple de Gurzil à Ghirza fut détruit vers l'an 544 apr. J.-C. en représailles byzantines[28]. Une statue de l'idole Gurzil aurait probablement utilisé plus tard par la reine berbère Kahina, lors de ses batailles contre l'invasion arabe et musulmane[29].
Chez les Austuriens, le chef a aussi la fonction de grand prêtre de Gurzil, qui est leur dieu principal[30]. Un temple, parmi les ruines de Ghirza, en Libye, est peut-être dédié à Gurzil, et le nom de la ville elle-même, pourrait être lié à son nom[31]. Le dieu gurzil a notamment été surnommé « Jupiter des Maures »[8]. Une inscription néo-punique découverte en 1846 à Lepcis Magna comporte le nom de Gurzil[11]. Ce dernier précède le nom de Saturne, ce qui révèle l'importance du dieu Gurzil[32]. Corippe attribuait aux Maures la vénération commune de Sinefere, Gurzil et Jupiter Amon[33].
Temples et topographie
Une inscription néo-punique découverte en 1846 à Leptis Magna mentionne le nom de Gurzil[11]. Ce nom précède celui de Saturne (Ammon), ce qui témoigne de l’importance du dieu Gurzil[34].
L'inscription néo-punique est partiellement endommagée et résiste à l'interprétation. Les quatre dernières lettres de la première ligne forment le nom de Gurzil, tandis que les quatre premières de la seconde ligne forment Satur. Si ce dernier correspond au dieu romain Saturne, cela suggère qu'il était assimilé à Gurzil selon une interpretatio Romana. Il s'agirait du seul exemple connu d'une telle assimilation parmi les Berbères. L'inscription pourrait être lue comme suit : « [untel] a financé les dépenses pour Gurzil–Saturne »[35].
Le nom de Gurzil pourrait être détecté ailleurs dans la toponymie de la Tripolitaine[17]. Un temple parmi les ruines de Ghirza en Libye aurait été dédié à Gurzil, d'autres temples à Iol et Tiddis, et même le nom de cette dernière ville pourraient être liés à son nom[36].
Selon l'écrivain musulman du IXe siècle Al-Bakri, il existait un lieu appelé Ghirza avec un sanctuaire situé au sommet d'une colline, contenant une idole en pierre que les tribus berbères de la région environnante continuaient à vénérer[17].
Le relief sculpté d'un dieu cornu à Volubilis a été provisoirement identifié comme une représentation de Gurzil, mais cette identification reste hautement spéculative[17].
Mythologie
Agurzil vivait à Tames, un petit village, avec son père Illas et sa mère Yellena, jusqu’au jour où celle-ci disparaît mystérieusement. Après plusieurs années de recherches infructueuses, il la retrouve sous l'apparence d'Amasis, prêtresse du temple d'Amon à Aghurmi près de l'oasis de Siwa. Mais avant qu'il ne puisse la prendre dans ses bras, sa mère meurt subitement dans les rues d'Aghurmi[37].
Sur les rives du Lac Triton, le jeune garçon Gurzil s’amuse à chercher des fossiles comme à son habitude lorsqu’il tombe sur une ammonite d’un éclat inhabituel. À peine l’a-t-il ramassée qu’une voix l’interpelle : « Pose l’ammonite à terre et rentre chez toi ! » Le jeune Agurzil fait alors la connaissance de Mosh, un être humanoïde pas plus grand qu’un figuier de Barbarie. Mosh appartient aux Aku-rims, un peuple souterrain et gardien des Vases de Vérité. Ce dernier l’accompagnera plusieurs années plus tard, lorsqu’Agurzil entreprendra son Grand Voyage à travers l’Afrique du Nord à la recherche de sa famille.
Agurzil apprend que sa mère a été enlevée et torturée par les Amazones avant de trouver refuge dans le temple d'Amon. La première chose qu’il pense alors à faire est de venger sa défunte mère.
Le Grand Voyage
N’ayant aucune expérience dans l’art de la guerre et peu d’informations sur le royaume des Amazones, Agurzil décide de se rendre dans l’Atlas pour retrouver son ami Maxcies de la tribu des Ifuraces.
Le jeune dieu rencontre Battusa, une guerrière amazone déchue, qui lui révèle que les Amazones souffrent sous la domination cruelle de la sorcière Taryel. Battusa lui fournit des parchemins détaillant la vie des Amazones avant de lui faire ses adieux. Conscient de la difficulté de sa tâche, Agurzil fait appel à son ami Mosh ainsi qu’à neuf Akur-rims, qui lui offrent des présents. En route vers Ugina, la forteresse des Amazones, Agurzil rend visite aux hermaphrodites de Machlyes et y apprend des techniques de combat pour affronter les guerriers de Taryel[37].
Ému par la souffrance des mortels, le jeune Agurzil s’éloigne progressivement des desseins royaux de son père Amon, avant de s’opposer ouvertement à son autorité. Il se lance alors dans une croisade contre la terrible déesse Ifri, dans un long périple qui l’emmènera aux quatre coins de l’Afrique du Nord. Sortira-t-il victorieux des multiples pièges de la déesse vindicative ?
Déterminé à venger la mort de sa mère, Agurzil et ses alliés affrontent Taryel et découvrent qu’elle a usurpé le royaume, réduit les Amazones en esclavage et transformé la reine Eliwen en hybride. Agurzil vainc Taryel et restaure le trône d’Eliwen, mais à un prix élevé : Taryel le maudit, lui laissant seulement deux lunes à vivre en tant qu’homme avant de devenir un être mi-homme, mi-taureau[37].
Durant son temps restant, Agurzil part à la recherche de son père, voyageant à travers l’Afrique du Nord et tombant amoureux d’une femme nommée Tillili, qu’il épouse. Plus tard, il apprend que son véritable père est le dieu Amon, qui l’a placé parmi les humains pour accomplir une prophétie visant à restaurer l’harmonie entre les dieux et les hommes. Après avoir vaincu la déesse Ifri — révélée comme étant Taryel sous une autre forme —, Agurzil quitte l’humanité pour rejoindre les dieux[37].
Le destin frappe à nouveau lorsque Tillili est retrouvée morte, mais leur fille, Anaruz, grandit choyée par les Amazones et devient leur reine. Elle parvient à unir les humains, les hybrides et les peuples souterrains d’Afrique du Nord, réalisant ainsi l’héritage d’Agurzil.
Annexes
Notes et références
- ↑ Georges (1863-1936) Auteur du texte Doublet et Paul (1866-1911) Auteur du texte Gauckler, Description de l'Afrique du Nord. Musées et collections archéologiques de l'Algérie et de la Tunisie. 2, Musée de Constantine / par Georges Doublet,... Paul Gauckler,..., (lire en ligne)
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- Jacques-Paul Migne, Encyclopédie théologique : ou série de dictionnaires sur toutes les parties de la science religieuse..., t. 34, (lire en ligne), p. 360.
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- ↑ J.-L. Charlet, « Corippe », Encyclopédie berbère, no 14, , p. 2104–2110 (ISSN 1015-7344, DOI 10.4000/encyclopedieberbere.2331) :
.« la mention répétée du dieu-taureau Gurzil (2, 109-112 ; 150-158 ; 5, 493-502) »
- ↑ Johan., II, 404-406.
- ↑ Corippe, V, v.8-31.
- ↑ Corippe, V, v.33-49.
- ↑ Corippe, V, v.56-62.
- ↑ (en) Arnold Hugh Martin Jones, John Robert Martindale et John Morris, The prosopography of the later Roman Empire, p. 612.
- ↑ (en) David J. Mattingly, Tripolitania, Routledge, (ISBN 978-1-135-78282-5, lire en ligne).
- ↑ Yves Modéran, « Kahena », Encyclopédie berbère, no 27, (lire en ligne, consulté le ).
- ↑ Corippe, II, v.109.
- ↑ René Basset, « Recherches sur la religion des Berbères », Revue de L’Histoire des Religions, (lire en ligne).
- ↑ (en) Elmayer (A.F.), The libyan god Gurzil in a neo-punic inscription from Tripolitania. Libyan Studies, t. 13, 1982, p. 49-50.
- ↑ Stéphanie Guédon, « L’émergence d’une société de la frontière ? », dans La frontière romaine de l’Africa sous le Haut-Empire, Casa de Velázquez, coll. « Bibliothèque de la Casa de Velázquez », , 247–274 p. (ISBN 978-84-9096-205-3, lire en ligne)
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- ↑ René Basset, Recherches sur la religion des Berberes, (lire en ligne
[PDF]), sur Scribd .
- Tiziri T. Wuming, Agurzil: le dieu impie fantasy, Éditions Amalthée, (ISBN 978-2-310-02557-7).
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- Gabriel Camps, « Gurzil », dans Gabriel Camps, Encyclopédie berbère, vol. 21 « Gland – Hadjarien », Edisud, (ISBN 2744900974, lire en ligne).
Articles connexes
- Corippe (vers 500-575, Flavius Cresconius Corippus), poète épique
- Ghirza, ruines romaines, poste du Limes Tripolitanus
Liens externes
- Article Gurzil'', Encyclopédie berbère, sur le site journals.openedition.org