Les Milonides de Tonnerre, sont la première dynastie comtale attestée à la tête du comté de Tonnerre, de la fin du IXe au Xe siècle. Elle tire son appellation du prénom — Milon, alias Miles, Mille — qu'ont porté un grand nombre de ses membres.
Histoire
[modifier | modifier le code]Origines incertaines
[modifier | modifier le code]Les origines des Milonides ne peuvent être établie avant l'an mil, selon Fromageot (1973)[1]. Chaume (1925) considérait qu'ils était issus de la noblesse bourguignonne et possédant des biens dans la région de Langres[2]. Fromageot (1973) considère qu'ils sont les descendants des comte de Langres, mentionnant ainsi Miles/Mille, fils du comte Miles [II] (vivant entre 880-894)[3].
Ils pourraient être issus, selon Petit (1888), de Girart de Roussillon[4], comte de Paris, puis comte de Vienne au IXe siècle.
Chaume (1925) considérait que les Milonides étaient issus d'un certain Miles/Milon de Narbonne, que l'on retrouve mentionné en 780/782, dans l'Histoire générale de Languedoc (t. I, t. II, preuves)[5].
Premiers membres attestés
[modifier | modifier le code]Les premiers membres de cette lignée se trouvent mentionnés à Tonnerre, à partir du Xe siècle, voire probablement déjà installé au siècle précédent. Les différentes mentions sont liés notamment au développement de l'abbaye Saint-Michel de Tonnerre.
Une charte de 980 indique que le comte de Tonnerre, Milon ou Mille (Milo comes pagi Tornodonensi), associé à l'évêque de Langres, Widric, fait restaurer l'abbaye Saint-Michel de Tonnerre (Cartulaire général de l'Yonne I no LXXVI)[6],[7]. Quelques années plus tard, au plus tôt en 997, un comte Milon fait don, avec son épouse, Ermengarde et ses chers fils Achard, Renard (Rainard) et Albéric (Aubri), de son aleu possédé à Coussegrey (Coussegré)[8],[9]. L'acte est souscrit par le comte Rainard, que Petit (1888) considérait comme être comte de Bar-sur-Seine[10],[7]. Le comte Milon semble mourir vers 998[8],[11]. Son fils Renard lui succède. Son épouse, Ermengarde, épouse, peu de temps après, en secondes noces le comte Herbert III de Vermandois[8],[11].
Le comte Renard, fils du comte Milon, fait don, d'après une charte antérieur à 1002/1003, avec l'appui de sa mère Ermengarde, de métairies, situées dans les environs de Tonnerre, au monastère Saint-Michel[8],[12],[13]. Dans cet acte, Renard est qualifié de « comte du pagus de Tonnerre » et sa mère de comtesse[14] (Raynardus comes Tornodorensis pagi et mater mea Ermengardis comitissa). Sa mère fonde en 1018 le prieuré de Saint-Valentin à Griselles, dans le Châtillonnais (en Bourgogne)[15],[11], en limites des comtés de Tonnerre, du Lassois et de Bar-sur-Seine[8]. Ces terres pouvaient appartenir, selon Petit (1888), à son propre héritage ou son douaire[8]. Son fils, sa belle-fille, Helvis/Helvide, et son petit-fils, Eudes (Odon), souscrivent à cette fondation[8],[15],[14],[11]. Dans cet acte, Ermengarde porte le titre de comtesse de Vermandois[11],[16]. La fondation reçoit le soutien de l'évêque de Langres, Lambert, qui possède une certaine autorité sur le Tonnerrois, mais semble également un parent des Milonides, appelant la comtesse « fidèle et amie très chère »[11]. On retrouve le comte Renard dans deux autres actes datées de 1031/1035 et de 1034/1038, aux côtés de son épouse, Helvis/Helvide, et de son fils Hardouin et sa fille Ermengarde[14].
Cependant, les historiens et généalogistes de cette famille se sont trouvés devant une difficulté puisqu'un autre comte de Tonnerre est mentionné dans des actes au cours de cette période. Ainsi, deux actes de 1022 et 1043 sont signés par Milon, « comte du château de Tonnerre »[17],[18]. Ce dernier est mentionné aux côtés de son épouse, Azeka[15],[18]. Petit (1888) faisait remarquer que le père Jacques Vignier (1842) avait admis « qu'Hervise et Azeca étaient deux sœurs qui avaient apporté Bar-sur-Seine par leur alliance avec les deux frères Rainard et Mile III. Son hypothèse, dénuée de preuves, a été adoptée par tous les auteurs et par l'Art de vérifier les dates. »[8]
Extinction de la famille
[modifier | modifier le code]La branche aînée semble s'éteindre au cours du XIe siècle, notamment avec le passage par mariage du comté de Tonnerre sous la coupe de la maison de Nevers[19],[20].
Filiation
[modifier | modifier le code]La généalogie des Milonides a fait l'objet de nombreuses publications parfois contradictoires, notamment au XIXe siècle.
Sont régulièrement cités les travaux de J. Vignier (Chroniques de l'évêché de Langres, 1842, Décade historique du diocèse de Langres, 1891-1894)[21] ; E. Petit (Histoire des ducs de Bourgogne de la race Capétienne, 1888)[22] ; A. Roserot (Dictionnaire historique de la Champagne méridionale, 1942-1948)[23] ; M. Chaume (Les origines du duché de Bourgogne, 1925-1937[24], Recherches d'histoire chrétienne et médiévale, 1947[25]) ; J. Laurent (Cartulaires de Molesme, 1907-1911, L'origine du comté de Bar, 1951)[26] ; M. Bur (La formation du comté de Champagne, 1977)[27] ou plus récemment ceux J.-N. Mathieu (Recherches sur les premiers comtes de Tonnerre, 1994, Nouvelles recherches sur les premiers comtes de Tonnerre 1999)[28],[29]. La numérotation des Miles peut varier selon les publications.
La filiation suivante est une synthèse du Dictionnaire biographique, généalogique et historique de l'Yonne (1996)[30] et des travaux de J.-N. Mathieu (1994, 1999)[28],[31] :
- Miles (Mille, Milon/Millon) Ier (vivant en 880-894), comte de Tonnerre, fils de Miles [II], comte de Langres, ∞ Atila.
- Miles [II] (…), comte de Tonnerre.
- Gui Ier, comte de Tonnerre, ∞ Adèle, fille d'Aubri.
- Miles (Mille, Milon/Millon) [III] (vivant en 975-985), comte de Tonnerre, ∞ Engeltru/Engeltrude/Ingeltru/Ingeltrudis/Ingeltrude [de Montreuil][n 1], probable fille d'Engelbert II de Brienne (selon Petit).
- Miles [IV] († v. /3), comte de Tonnerre (997), ∞ Ermengarde/Hermangarde [de Bar(-sur-seine)], probable fille de Rainard de Bar-sur-Seine[10],[n 2], veuve (ou remariage[10]) avec Herbert III de Vermandois.
- Achard (vivant v. 907).
- Renard/Rainard/Renaud Ier (vivant v. 907, 1009-1040), comte de Tonnerre (997, 1002, 1039) et de Bar-sur-Seine, ∞ Helvis/Helvide/Hadvide/Hervise/Ervide [de Vermandois] ou [de Bar] ou [de Breteuil].
- Eudes/Otto(n) (vivant en 1018).
- Harduin, évêque de Langres (1050-1065).
- Hermangarde/Ermengarde (vivante en 1036-1039), ∞ Guillaume Ier de Nevers († v. ).
- héritière du comté par son cousin Hugues-Renaud, qui passe à la maison de Nevers.
- Miles (Mille, Milon/Millon) [V] († v. /48), comte de Tonnerre (1022, 1043), ∞ Azeka/Azeko [de Bar] ou [de Breteuil], peut être la sœur d'Helvis/Hervise/Ervide.
- Hugues-Renaud/Renard († v. ), comte de Tonnerre et de Bar(-sur-seine) (1046), évêque de Langres (1065-1085).
- Eustachie († v. /1111), ∞ Gautier, comte de Brienne et de Bar(-sur-seine) (1081-1090).
- Waléran/Geoffroy († v. ).
- Gui/Guy.
- Eudes/Otto.
- Aubri/Albéric v. 907.
- Gui/Guy (vivant en 1040).
- Miles [IV] († v. /3), comte de Tonnerre (997), ∞ Ermengarde/Hermangarde [de Bar(-sur-seine)], probable fille de Rainard de Bar-sur-Seine[10],[n 2], veuve (ou remariage[10]) avec Herbert III de Vermandois.
- Guérin, évêque.
- Miles (Mille, Milon/Millon) [III] (vivant en 975-985), comte de Tonnerre, ∞ Engeltru/Engeltrude/Ingeltru/Ingeltrudis/Ingeltrude [de Montreuil][n 1], probable fille d'Engelbert II de Brienne (selon Petit).
- Achard, évêque de Langres (948-969), comte de Langres (à partir de 967).
- Gui Ier, comte de Tonnerre, ∞ Adèle, fille d'Aubri.
- Regintrudis, ∞ Girbold/Gerbaut (vivant en 878-892), comte d'Auxere.
- Miles [II] (…), comte de Tonnerre.
Le lien entre Rainard/Renaud et Miles V ne fait pas consensus. Certains auteurs en font deux frères. Mathieu (1994, 1999) considère que Rainard/Renaud et Miles V ne seraient qu'une seule et même personne. Il ajoute par ailleurs que le prénom Azeka/Azeko serait une forme hypocoristique d'Helvis[28],[29].
Personnalités
[modifier | modifier le code]- Harduin, évêque de Langres (1050-1065).
- Hugues-Renaud/Renard, dit de Bar († v. ), comte de Tonnerre et de Bar(-sur-seine) (1046), évêque de Langres (1065-1085).
- Hermangarde/Ermengarde, héritière du comté de Tonnerre qui passage à la maison de Nevers par son mariage.
- Achard, évêque de Langres (948-969), comte de Langres (à partir de 967).
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
[modifier | modifier le code]Références
[modifier | modifier le code]- ↑ Fromageot 1973, p. 14.
- ↑ Chaume 1925-1937, p. 185.
- ↑ Fromageot 1973, p. 15.
- ↑ Petit 1888, p. 420.
- ↑ Chaume 1925-1937, p. 130, 532, 538, Tableau généalogie.
- ↑ Fromageot 1973, p. 9.
- Mathieu 1994, p. 21, 25.
- Petit 1888, p. 425.
- ↑ Mathieu 1994, p. 21.
- Petit 1888, p. 429.
- Christian Sapin et Noëlle Deflou-Leca, Saint-Valentin de Griselles : du culte érémitique à la fondation monastique, t. XXXIX, Mémoires de la Commission des Antiquités du département de la Côte d’Or, 2000-2001 (lire en ligne [PDF]), pp. 75-126.
- ↑ Mathieu 1994, p. 22, 25.
- ↑ Mathieu 1999, p. 4.
- Mathieu 1999, p. 4, 15.
- Mathieu 1994, p. 22.
- ↑ Petit 1888, p. 432-441..
- ↑ Mathieu 1994, p. 22, 25-26.
- Mathieu 1999, p. 5, 15.
- ↑ Fromageot 1999, p. 17, 20.
- ↑ Dugenne 2000, p. 1780, Comtes de Tonnerre.
- ↑ Jacques Vignier, Décade historique du diocèse de Langres, vol. 3, Langres, Rallet-Bideaud, 1891-1894.
- ↑ Petit 1888, p. 419-442.
- ↑ Alphonse Roserot, Dictionnaire historique de la Champagne méridionale (Aube), des origines à 1790, vol. 3, Langres, impr. Champenoise, 1942-1948.
- ↑ Chaume 1925-1937.
- ↑ Chaume 1947.
- ↑ Jacques Laurent, Cartulaires de l'abbaye de Molesmes, ancien diocèse de Langres, 916-1250 : recueil de documents sur le nord de la Bourgogne et le midi de la Champagne, t. I, (lire en ligne sur Gallica), chap. IV (« Des comtes de Bar-sur-Seine et des seigneurs de Montbard »), p. 319-324.
Jacques Laurent, chap. 8 « L'origine du comté de Bar », dans Discussions et documents sur le duché carolingien et capétien (Annales de Bourgogne), (lire en ligne), p. 172-180. - ↑ Michel Bur, La formation du comté de Champagne (v. 950-v. 1150), Nancy, Université de Nancy-II - Mémoires des Annales de l'Est, , 573 p., chap. 54.
- Mathieu 1994.
- Fromageot 1999.
- ↑ Dugenne 2000, p. 1779-1780, Comtes de Tonnerre.
- ↑ Mathieu 1999.
- ↑ Petit 1888, p. 423-424.
- ↑ Lucien Coutant, Histoire de la ville et de l'ancien comté de Bar-sur-Seine, , 476 p. (lire en ligne), p. 371-376
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Ambroise Challe, Histoire du comté de Tonnerre, Le Livre d'histoire, (réimpr. 2010) (1re éd. 1875) (ISBN 978-2-7586-0446-4).
- Maurice Chaume, Recherches d'histoire chrétienne et médiévale : mélanges publiés à la mémoire de l'historien avec une biographie, Dijon, Académie des sciences, arts et belles-lettres, , 350 p. (lire en ligne).
- Maurice Chaume, Les origines du duché de Bourgogne, vol. 2, Dijon, Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon, 1925-1937.
- Partie 1, 1925, 600 pages sur Gallica.
- Partie 2, Fascicule 1, 1927, 382 pages sur Gallica
- Partie 2, Fascicule 2, 1937, 816 pages sur Gallica
- Appendice, dont le « Tableau généalogie no VI. Les Mille et les Anchier », pp. 538-539, [PDF] lire en ligne).
- Paul-Camille Dugenne, Dictionnaire biographique, généalogique et historique de l'Yonne. t. III. L.-N., Société généalogique de l'Yonne, .
- Paul-Camille Dugenne, Dictionnaire biographique, généalogique et historique de l'Yonne. t. V. S.-U., Société généalogique de l'Yonne, , p. 1779-1780, Comtes de Tonnerre.
- Jean Fromageot, Tonnerre et son comté des origines à la Révolution de 1789, Le Livre d'histoire, coll. « Monographies des villes et villages de France », (réimpr. 2000) (1re éd. 1973), 540 p. (ISBN 2-84435-156-5).
- Jean-Noël Mathieu, « Nouvelles recherches sur les premiers comtes de Tonnerre et de Bar-sur-Seine », Bulletin archéologique et historique du Tonnerrois, no 51, , p. 4-18.
- Jean-Noël Mathieu, « Recherches sur les premiers comtes de Tonnerre et de Bar-sur-Seine », Bulletin archéologique et historique du Tonnerrois, no 47, , p. 21-29.
- Ernest Petit, Histoire des ducs de Bourgogne de la race capétienne avec des documents inédits et des pièces justificatives, t. II, Paris, Lechevalier, , « Généalogie des premiers comtes de Tonnerre, documents inédits du Xe siècle pour servir à l'histoire… et des comtes inconnus jusqu'ici de Bar-sur-Seine », p. 419-442, lire en ligne sur Gallica.
Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
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- (en) « Burgundy Duchy - Comtes de Tonnerre », sur fmg.ac/MedLands (Foundation for Medieval Genealogy), (consulté en ).